Les Vérités Éternelles
Prétendre qu’il est indifférent de vivre dans la vérité ou dans l’erreur, d’appartenir à telle ou telle Église, de régler sa vie d’après les principes de la vraie religion ou selon les maximes du monde, c’est une coupable folie, car il en faudrait conclure ou qu’il n’y a point de vérité, ou que la vérité ne vaut pas mieux que l’erreur. De plus, c’est une offense à Dieu, qui nous a donné la vraie religion par le ministère de Jésus-Christ, et qui établi pour tous les hommes la véritable Église. Enfin, c’est une erreur pleine de périls, car notre avenir ne se règlera point sur les conjectures plus ou moins ingénieuse de notre imagination, mais d’après la vérité éternelle, qui est une et ne change jamais.
Quand on se trouve devant un précipice, est-il sage de fermer les yeux et de dire : « Que m’importe ? Il m’est indifférent d’y tomber ou de n’y point tomber ! » Eh bien, ne marchez-vous pas vers un abîme ? Chaque jour qui s’écoule ne vous rapproche-t-il pas de la mort ?
Pilate dit au Sauveur : « Qu’est ce que la vérité ? » Mais dans son insouciance coupable, distrait par des intérêts secondaires, il se détourna de Jésus avant d’avoir entendu sa réponse, et bientôt après fut entrainé à livrer le Juste à la mort.
Pour nous qui voulons ne pas nous égarer, méditons souvent et attentivement les grandes vérités de la foi. Elles sont toutes contenues dans le Symbole des Apôtres.
onnaître la vérité, en nourrir son intelligence, c’est le premier devoir de tout homme raisonnable. Le secret de notre destinée, la dignité de notre vie, notre félicité dans le temps, notre salut dans l’éternité, tout dépend pour nous de cette vérité divine.
C
§1 et 2. JE CROIS EN DIEU, CRÉATEUR DU CIEL ET DE LA TERRE.
Voici l’enseignement du concile du Vatican sur Dieu :
La sainte Église catholique, apostolique et romaine croit et professe qu’il y a un seul Dieu, vrai et vivant, créateur et maître du ciel et de la terre, tout-puissant, éternel, immense, incompréhensible, infini en intelligence, en volonté et en tout perfection. Ce Dieu, étant une puissance spirituelle, une, singulière, entièrement simple et incommutable, doit être proclamé en lui-même, dans son essence, distinct du monde, infiniment heureux en lui-même et par lui-même, et élevé d’une manière ineffable au-dessus de tout ce qui n’est pas lui et cependant existe ou peut se concevoir.
L’univers, à la fois si limité et si parfait, proclame l’existence de Dieu. Dieu, en lui-même, est tout ; le monde, en lui-même n’est rien. Il faudrait être insensé pour soutenir que l’univers s’est fait tout seul. C’est `dieu qui a tiré du néant le monde et tout ce qui est dans le monde, les choses spirituelles comme les matérielles, leur forme et toute leur substance. Ce qu’on appelle le néant n’était pas un être, une substance déjà existante. La foi nous enseigne qu’avant la création, il n’y avait rien dont la création eût pu être formée. Cette vérité révélée est parfaitement conforme à la raison, qui se rend aisément compte que toute explication de l’origine du monde est impossible à soutenir et que la toute-puissance de Dieu a seule pu donner l’être à ce qui n’était pas.
- Mais comment Dieu a-t-il créé le monde ?
- Seigneur, comment saurais-je vous comprendre, vous et vos œuvres, dont la grandeur est infinie, alors que, dans la plus simple de mes pensées, je demeure pour moi-même, qui ne suis pourtant qu’une infime créature, un mystère que je ne puis pénétrer ?
Puisque Dieu est le créateur de toutes choses, le monde entier et l’homme dans ce monde lui appartiennent sans réserve. Oui, vous êtes la propriété de Dieu ; vous dépendez de lui seul, que vous le vouliez ou non. Dieu, qui est la sagesse suprême, n’a rien créé sans dessein et sans but. Il avait une pensée sur vous lorsqu’il vous a tiré du néant. Or, étant le principe de tous les êtres, il doit, par une sainte nécessité de sa nature, rapporter à lui seul tout ce qu’il crée. Tout ce qui est vient de lui, n’existe que pour lui. Voilà l’ordre, voilà la vérité. Dieu seul peut être le but final, la fin suprême de la divine volonté, et tout doit tendre à la gloire de son saint nom. Je suis donc, moi aussi, sur la terre, pour glorifier mon Créateur ; c’est pour cela qu’il m’a donné l’être et la vie, et celui qui m’a créé tout entier me réclame tout entier pour lui.
De même qu’une œuvre d’art satisfait l’artiste dans la mesure où elle rend fidèlement sa pensée, de même je satisferai d’autant plus mon Seigneur et mon Maître, que, par une détermination libre et spontanée de ma volonté, je réaliserai plus parfaitement sa pensée sur moi, ici-bas dans la lutter et l’épreuve, là-haut dans la félicité éternelle. Etre homme signifie donc avoir pour destinée et pour devoir le service de Dieu. Dieu est mon maître, je suis son serviteur ; Dieu est mon roi, je suis son sodat ; Dieu est mon père, je suis son enfant. De même que l’esprit anime cette misérable enveloppe de boue qui est mon corps, ainsi la pensée de ma haute destinée doit inspirer jusqu’aux moindres actes de ma vie.
Dieu a créé aussi le monde pour le bien des créatures : il l’a créé, non que le monde lui fût nécessaire, mais parce qu’étant infiniment bon, il a voulu communiquer les biens et la félicité dont il jouit. C’est en Dieu seul que je trouverai mon bonheur.
Dieu, l’être parfait par excellence, prend soin du monde qui est son ouvrage. Il veut la félicité de tous, et d’avance ne condamne personne à la ruine éternelle ; c’est l’impie qui, par le péché, pose en lui-même le principe de sa perdition.
D’où vient donc le mal qui est dans le monde ?
En partie de l’imperfection inhérente à toute créature ; en partie du caractère de notre vie terrestre, qui n’est qu’un degré bientôt franchi conduisant à l’éternité. Sans doute, il y a dans le monde bien des maux et bien des douleurs ; mais nous pouvons et devons les mettre à profit pour notre salut éternel.
Nos souffrances ne nous paraissent si grandes que parce que nous sommes très petits : si nous les envisagions du côté du ciel, nous trouverions légères. Si vous étiez bien persuadé que la plupart des épreuves, que nous avons à supporter sur cette terre, sont nécessaires à notre salut, vous conviendriez que, mieux éclairés, nous envierions aux autres, moins leurs joies que leurs souffrances.
Pour ce qui est de la lutte du bien et du mal en ce monde, soyez convaincu qu’il y a plus d’hommes vertueux qu’on ne le croirait en ne jugeant les choses que sur l’apparence. La vertu aime à rester cachée, tandis que le mal se montre et fait grand bruit. Néanmoins, l’empire du mal est considérable, mais le mal ne vient pas de Dieu ; il a ses causes dans la liberté des âmes que Dieu a créées, et, si Dieu permet le mal, c’est qu’il se réserve de le faire tourner à notre avantage. Plus, en effet, le règne du péché s’étend, plus il est difficile de persévérer dans la crainte de Dieu et dans la voie des commandements divins, plus aussi Dieu est glorifié par la fidélité du petit nombre de ses serviteurs.
Dieu, à l’origine, avait destiné le genre humain à un état plus parfait, à une félicité plus haute que ne le comportait sa nature. Adam a connu ce parfait état de grâce , cette vie d’intime et filiale union avec le Créateur. Mais Dieu avait résolu de faire dépendre la continuation de ses dons de la fidélité de nos premiers parents. Il lui avait plu de les soumettre à une épreuve proportionnée à leur condition ; et, par un décret insondable de sa sagesse, il avait voulu que la conduite de notre premier père entrainât toute sa descendance dans la voie qu’Adam aurait lui-même choisie. L’homme succomba dans l’épreuve, et la perte de la grâce sanctifiante, conséquence de sa faute, s’étendit à toute sa postérité. Depuis la chute d’Adam, tous les hommes naissent souillés aux yeux de Dieu, et dépouillés de cette grâce et des autres dons précieux qui, dans le plan primitif de leur Créateur, devaient toujours les revêtir.
Dieu a créé aussi un monde invisible, une multitude innombrable d’esprits que nous appelons les Anges. Nous ne pouvons douter de leur existence, puisque la Sainte Ecriture nous la révèle. D’ailleurs, il semble naturel que les degrés de perfection que nous observons dans le monde visible se trouvent répétés dans le monde des esprits. Nous ne pouvons, à la vérité, nous représenter ces esprits célestes ; mais celui qui nie ce dont il ne peut se faire une idée, doit en premier lieu nier sa propre intelligence.
Comme les hommes, les Anges furent soumis à une épreuve conforme à leur nature. Un grand nombre d’entre eux n’en sortirent point vainqueurs. Regardant comme une humiliation l’état pourtant si élevé où la grâce les avait placés, ils prétendirent tenir d’eux-mêmes ce dont ils n’étaient redevables qu’à la libéralité de leur Créateur. Aussi Dieu les abandonna-t-il à la malédiction que leur orgueil avait attirée sur eux. Ils étaient sans excuse, car ils étaient tombés en parfaite connaissance de cause, en parfaite liberté, par un acte de pure malice, joint à une ingratitude sans bornes.
Les anges restés fidèles à Dieu nous aiment et nous assistent ; les mauvais anges, au contraire, poussés par la haine et l’envie, nous poursuivent de leurs embûches, et cherchent sans cesse à nous entraîner dans le péché pour nous faire partager leur éternelle réprobation. Pour se convaincre de l’action des mauvais esprits dans le monde, il suffit de jeter les yeux sur la perversité surhumaine, ou plutôt contre nature, qui trop souvent prédomine dans l’histoire de l’humanité.
Tout le mal que l’ennemi de nos âmes a causé et cause encore, a pour principe l’esprit d’insubordination et de révolte. C’est par là que Satan attaqua le premier homme le jour où il voulut le perdre. Trompé par ses conseils perfides, Adam se crut en état de devenir, par ses propres efforts, ce qu’il ne pouvait être que par sas parfaite soumission à Dieu. Le même esprit d’indépendance et d’orgueil égare encore aujourd’hui l’humanité déchue : Le père dont vous êtes nés est le démon, et vous voulez accomplir les désirs de votre père (1). – L’entier abandon à Dieu, l’aveu de notre dépendance, sont pour nous l’unique voie du salut.
§3. ET EN JÉSUS-CHRIST SON FILS UNIQUE.
Par le péché originel, l’homme a offensé l’Infini, la justice de Dieu exige une réparation également infinie, et c’est pourquoi aucune créature n’est en état de la lui offrir. Dieu, dans ses insondables décrets, à la fois de justice et d’amour, ayant résolut de pardonner à l’homme criminel, et de lui rendre, moyennant une réparation proportionnée à l’offense, les dons surnaturels perdus, il fallait de toute nécessité qu’une des trois personnes de la Sainte Trinité s’incarnât et s’unit à la nature humaine. Seul, un abaissement infini, d’un prix également infini, pouvait suffire à notre rançon.
La seconde personne de la Sainte Trinité a accepté cette humiliation prodigieuse, elle s’y est soumise librement, par amour. L’incarnation n’a pas eu d’autre motif que l’infinie charité d’un Dieu, et peut-être Dieu n’eût-il pas permis que l’homme fût tenté, s’il ne fût entré dans ses desseins adorables de nous révéler toute l’étendue de son amour et de sa miséricorde envers les hommes.
Dieu promit donc d’envoyer son Verbe sur la terre, et Jésus, se substituant à l’homme déchu, est venu offrir à la justice offensée une satisfaction surabondante. L’union d’une des trois personnes de la Sainte Trinité avec la nature angélique aurait suffi pour apaiser la justice divine, mais non pour contenter l’amour de notre Sauveur ; il voulut s’anéantir en s’abaissant jusqu’à nous. Ce fut donc par un acte de libre amour et de miséricorde toute gratuite que Dieu, faisant naître Jésus de la Vierge Marie, le donna comme nouveau chef à l’humanité coupable, afin qu’il pût accomplir à notre place une réparation parfaite et ramener les hommes à sa suite jusque dans les cieux : C’est en cela qu’a paru la charité de Dieu envers nous : c’est qu’il a envoyé son Fils unique dans le monde, afin que nous vivions pour lui 1.
Marie, comme son divin Fils, a été préservée, dès le principe, du péché originel : elle a été conçue sans péché, c’est à dire que, dès le premier instant de son existence son âme fut ornée de la grâce sanctifiante, tandis que nous ne recevons ce trésor sans prix que dans le saint baptême.
Il est certain que les enfants qui meurent sans baptême ne jouiront jamais de la vision béatifique et surnaturelle : mais il ne faut pas croire, avec Luther et Zwingle, qu’ils soient condamnés à une éternité de souffrances. Eux aussi, bien que fixés désormais dans les limites de leur condition naturelle, on à se féliciter d’avoir reçu le don de la vie, et ils se réjouiront éternellement dans leur Créateur.
Jésus de Nazareth est le Rédempteur promis au monde dès l’origine. En lui, dans sa vie, dans sa Passion, s’est accompli de point en point tout ce que les prophètes avaient annoncé touchant le Messie.
Mais tout homme raisonnable est-il forcé, par l’évidence des faits, de reconnaître et de confesser la divine mission de Jésus-Christ ? Non, la vérité chrétienne n’est point environnée ici-bas d’une lumière tellement éclatante, que tout les hommes, ceux mêmes qui sont pervers et mal intentionnés, soient forcés de lui rendre hommage ; néanmoins elle brille d’un éclat assez vif pour que tout esprit loyal, tout homme de bonne volonté, soit forcé de reconnaître et de confesser sa divinité.
Pour s’en convaincre, il suffit d’ouvrir les yeux et de réfléchir un instant. Rien que le fait de l’existence du Christianisme est un miracle permanent. Dieu seul a pu faire accepter à des esprits orgueilleux des vérités si humiliantes ; à des cœurs tournés vers la terre, des sentiments si élevés ; à des hommes corrompus, une morale si austère. L’œuvre de Jésus-Christ est bien certainement aux yeux de quiconque l’examine sans parti pris, le plus grand miracle qui fut jamais ; et ce miracle dure depuis dix-huit cents ans, malgré des tempêtes et des persécutions continuelles ! Si vous voyiez émerger à la surface de l’océan un monument colossal, vous en concluriez assurément que ses fondements sont gigantesques, alors même que vous ne pourriez les apercevoir ; mais si l’on venait vous apprendre que cet édifice grandiose repose au milieu des flots sur un brin d’herbe marine, ne seriez-vous pas convaincu que sa solidité et sa durée ne peuvent être que l’effet d’une miracle ? Eh bien ! demandez à l’histoire sur quelle base s’appuie, dans les profondeurs du passé, le majestueux monument du Christianisme, qui, dominant les vagues sans cesse agitées des temps passés, s’élève aujourd’hui devant vous ! Elle vous montrera un morceau de bois, la Croix du Golgotha. Et, pour que vous ne puissiez mettre en doute ce fait historique, Dieu en maintient sous vos yeux la preuve permanente ; il a voulu que le peuple décide, qui a dressé cette Croix, ne fût jamais détruit, mais subsistât, malgré toutes les persécutions et les défaites, errant et dispersé parmi toutes les nations de la terre, selon qu’il avait été prédit du peuple juif, et ayant une existence à part qui ne ressemble à celle d’aucun autre peuple. Oui, le Christianisme tout entier repose sur une Croix ! Ce fait est à lui seul le plus éclatant des miracles. Fonder une religion capable de convaincre tout un monde au moment où l’on expire sur un gibet d’infamie, n’est-ce pas plus difficile que de bâtir un édifice sans autre fondement qu’un brin d’herbe ? Ne serait-il pas plus aisé de subjuguer le plus puissant royaume de la terre à l’aide de douze soldats de bois, que de convertir le monde entier, au moyen de douze pêcheurs ignorants et grossiers qui ne prêchent autre chose que la folie de la Croix ? Qu’y a-t-il de plus merveilleux, ou de tirer le monde du néant, ou de transformer des esprits superbes, des cœurs avides de jouissances en adorateurs et en disciples d’un crucifié ?
Il n’est que trop fréquent de voir les êtres, les plus tendrement aimés de leur vivant, bientôt oubliés après leur mort. Pour Jésus-Christ, c’est le contraire qui se passe. Tandis qu’il est encore de ce monde, ses apôtres le renient et l’abandonnent. A peine a-t-il rendu le dernier soupir, qu’ils se déclarent prêts à tout sacrifier pour son amour, et donnent joyeusement leur vie pour lui.
Ce qui est non moins extraordinaire, c’est que tandis qu’il est si difficile de rester longtemps en possession de l’admiration des hommes, nous voyons, après dix-huit siècles écoulé, l’élite de l’humanité, les meilleurs, les plus sages, les plus purs, se presser, se grouper autour de la Croix. Seuls, les méchants, les dépravés se détournent d’elle ou la blasphèment, frémissant quelquefois de rage à sa vue. Tous les jours, des vieillards, des hommes faits, des vierges, des enfant, après avoir mûrement réfléchi, et basant leur résolution sur la conviction la plus ferme, quittent tout pour suivre Jésus, et plusieurs s’estiment heureux de répandre leur sang pour lui, d’expier comme lui dans les opprobres et les supplices ! Un gibet, réservé aux plus vils malfaiteurs, est devenu l’unique colonne de la vérité, de la justice, de la sainteté, la suprême consolation de milliers de mourants, qui, sur le point de paraître devant leur Juge, pressent encore de leurs lèvres pâles le bois de cette Croix sacrée !
Que faut-il donc penser de ceux qui doutent de la divinité de Jésus-Christ ? Qu’ils n’ont jamais pris la peine de réfléchir, et que, pour beaucoup cette coupable négligence en un sujet si important constitue un péché grave.
La divinité de Jésus-Christ peut se prouver de bien des manières, et son évidence est telle qu’elle éclate aux yeux de quiconque n’y oppose point de résistance voulue.
Elle s’appuie sur le témoignage des prophètes et sur celui de Jésus lui-même, qui, à maintes reprises, a solennellement attesté qu’il était Fils de Dieu et Dieu comme son Père ; et il savait bien que personne ne pouvait se méprendre sur le sens de ses paroles. Ce témoignage, il l’a confirmé par la sainteté toute divine de sa vie, par des miracles et des prophéties : Comme le Père ressuscite les morts et les vivifie, ainsi le Fils vivifie ceux qu’il veut, afin que tous honorent le Fils comme ils honorent le Père 1
En outre, Jésus-Christ a scellé de son sang le dogme de sa divinité. Devant le tribunal de Caïphe qui l’adjure de lui répondre au nom du Dieu vivant, il affirme, avec une assurance pleine de majesté, qu’il est le Christ, le Fils de Dieu 2, et peu d’heures après cette déclaration solennelle, après d’indicibles tourments, il expire sur la Croix. Que serait sa douloureuse Passion, s’il n’était Dieu ? Rien que le supplice mérité d’un vulgaire imposteur qui s’est donné pour ce qu’il n’était pas ! L’incrédulité la plus endurcie est embarrassée pour admettre une pareille hypothèse.
Les Apôtres ont proclamé hautement la Divinité de leur Maître, comme l’attestent une foule de passages de la sainte Ecriture. Les premiers chrétiens étaient bien souvent raillés à cause du culte qu’ils rendaient à un supplicié. Les martyrs, au milieu des plus atroces tourments, confessaient avec ardeur la Divinité de Jésus, et souvent il plut à Dieu de confirmer par d’éclatants miracles la foi de ces généreux athlètes.
Enfin la preuve la plus irréfutable de la Divinité de Jésus-Christ, c’est l’œuvre qu’il a accomplie. Quel prodige, en effet, que la conversion de tout un monde à la folie de la Croix !
Jésus propose aux hommes une vérité éclatante comme le soleil, une sainteté pure comme la lumière, une justice qui pénètre jusqu’au plus intime de la conscience, un amour qui brûle d’apporter à tous les hommes miséricorde, pardon, paix et bonheur ! En vérité, tout cela est divin !
§4. NOTRE-SEIGNEUR.
Le fils de Dieu fait homme n’est pas seulement notre Seigneur parce qu’il est Dieu, mais encore en tant qu’il est homme : Car nul autre nom sous le ciel n’a été donné aux hommes par lequel nous devions être sauvés 1.
Que serait le monde sans Jésus-Christ, sans ses révélations, sa grâce, ses exemples, son immolation ? Tout ce qui se rapporte à notre salut est lié pour nous à Jésus-Christ. La vraie Justice sans le Christianisme est aussi impossible que le Christianisme sans la justice 2.
Regardez autour de vous. Plus vous connaîtrez les hommes, plus vous vous apercevrez que, sans Jésus-Christ, toute vertu n’est qu’orgueil déguisé, c’est-à-dire hypocrisie ; toute éducation, toute civilisation, que l’art de dissimuler habilement, sous les raffinements de la délicatesse, la corruption d’un cœur dépravé. Dans aucun des grands domaines qui constituent la vie humaine, nul ne peut poser d’autre fondement que celui que Dieu lui-même a établi : Jésus-Christ.
La révélation de Jésus-Christ est-elle donc d’une si grande importance pour l’humanité ?
Cette révélation est l’un des plus grands bienfaits de Dieu. La lumière qui nous vient des hommes ressemble à cette faible lueur qui, la nuit, éclaire nos pas d’un rayon court et tremblant. La lumière qui vient du ciel, au contraire, est semblable à la brillante clarté du soleil : elle illumine toute chose, et jusqu’à l’horizon le plus lointain.
La révélation commence par confirmer, appuyer, et fortifier les vérités fondamentales que proclame notre raison. Grâce à elle, nous sommes plus certains que c’est Dieux qui nous a créés ; qu’il ne nous a donné la vie que pour le glorifier par une conduite agréable à ses yeux et capable d’assurer notre salut ; que Dieu, après la mort, punit le mal et récompense le bien ; qu’il voit tout, et veille à nos besoins par sa Providence attentive. La révélation est la source de toute civilisation, de toute science, de toute éducation dignes de ce nom. Quand au gouvernement de notre vie, n’est-il pas évident que la faible lumière qui est en nous, ne suffit pas à nous éclairer dans les épreuves et les difficultés de la route ? Suivons donc avec une ardente reconnaissance cette lumière plus pure, que Dieu nous a donnée pour nous conduire dans l’obscur pèlerinage d’ici-bas.
Combien ne serions-nous pas à plaindre si nous étions condamnés à nous livrer à de longues recherches pour découvrir des vérités dont dépend tout notre bonheur ! En admettant que beaucoup aient le loisir et les capacité nécessaires à une tâche si ardue, il faudrait toujours finir par répéter la parole qui, de nos jours, s’applique à tant de savants : O homme, mélange singulier d’intelligence et de matière, tu es fier des lumières de ta raison, et tu n’en fais aucun usage ! Nous n’avons pas été créés pour chercher la vérité comme à tâtons, pour passer la plus grande partie de notre vie à faire et défaire des hypothèses et des conjectures ; nous avons été créés pour agir. Si la vérité doit nous affranchir, si elle doit être la règle de notre vie, il faut qu’elle nous soit présentée sous une forme accessible à tous, concise, claire, solide, afin que, l’acceptant sans hésitation, nous nous déterminions avec humilité à y conformer notre conduite.
En second lieu, la révélation nous fait pénétrer dans ce mystère insondable de l’amour divin que, livrés à nous-mêmes, nous n’aurions jamais pu même pressentir. La création, il est vrai, nous révèle la puissance et la sagesse infinie de Dieu ; mais nous ne connaîtrions pas sa charité sans bornes si nous n’avions appris que, voulant sauver chacun de nous, il s’est abaissé jusqu’à venir lui-même relever de la fange sa pauvre créature déchue pour en faire son enfant de prédilection. Le chrétien peut être comparé à une médaille sur laquelle on aurait, d’un côté, gravé moins que rien, et de l’autre : tout avec Dieu. La destinée que Dieu, dans son incompréhensible bonté, réserve à l’homme, sa créature, n’est donc pas restreinte à cette sphère de vie et d’action suprasensible, à laquelle l’esprit humain ne parvient qu’avec des facultés immatérielles. Elle appartient au domaine surnaturel, auquel notre âme ne peut avoir accès ni par ses seuls efforts, ni par ses aspirations les plus élevées. Cette destinée est un bien si précieux, que seule la charité infinie pouvait nous y faire participer. En un mot, Dieu a résolu de se donner lui-même un jour à nous. Or ce dessein d’amour, ce secret divin, la révélation nous le découvre, et c’est pourquoi la religion de Jésus-Christ est surnaturelle par essence, non seulement à cause du miracle de son institution, mais parce qu’elle nous révèle des mystères au-dessus de l’ordre naturel. Prenons, par exemple, les mystères de la Sainte Trinité, de l’Incarnation, de l’Eucharistie. Ces dogmes sont inaccessibles à notre raison, comme le sont pour un aveugle-né les phénomènes brillants et variés de la lumière. C’est en les recevant ici-bas avec un cœur humble et docile, confiants dans l’infaillible promesse de notre Dieu, que nous nous rendrons dignes, par sa grâce, de les contempler un jour dans la vision bienheureuse de l’éternelle Vérité.
Parce que nous ne pouvons comprendre les mystères, s’en suit-il que nous devions les mettre en doute ? Mais, s’il en était ainsi, de quoi ne devrions-nous pas douter ? Un célèbre penseur a dit : « De toutes les objections qu’on élève contre le Christianisme, il n’en est pas de plus vide de sens que l’impossibilité où l’on se dit de pénétrer ses mystères. »
Dieu nous a fait parvenir la révélation par un intermédiaire accessible à nos sens, humain, visible à tous les yeux, par Jésus-Christ, notre divin Rédempteur, et Jésus, en fondant son Église, a chargé saint Pierre et ses successeurs de le représenter sur la terre après son ascension glorieuse. L’autorité de l’Église fondée par Jésus-Christ ne repose pas sur l’autorité de l’Ecriture, car cette Église existait avant tout Evangile écrit. La révélation est venue jusqu’à nous, en premier lieu par la tradition orale, ensuite par les Livres Saints. La Tradition et l’Evangile sont donc les sources immédiates de notre foi, et c’est en elles que nous devons puiser sans cesse la doctrine du salut. Néanmoins des fontaines d’eau vive nous seraient d’un faible secours si l’Église n’était pas là pour nous en ouvrir l’accès, pour nous en garantir la pureté. D’une part, l’intelligence de l’Ecriture Sainte et de la Tradition exige une science spéciale ; d’autre part, l’homme, en général, est naturellement porté à suivre une direction humaine. C’est pour répondre à ces désirs, à ces besoins de notre nature, que Jésus-Christ a fondé l’Église, corps doctrinal permanent, tenant ses pouvoirs de Dieu même. Aussi la doctrine de l’Église est-elle pour nous la règle imprescriptible et directe de la foi, et ce n’est que sur sa parole que nous tenons la Bible non seulement pour un livre inspiré, mais pour la parole de Dieu m^me (1). C’est son autorité qui crée pour nous l’autorité des Saintes Ecritures. L’Église ne permet pas à tous la lecture des Livres Saints, parce qu’elle sait qu’ils renferment des endroits difficiles à entendre que des hommes ignorants et légers détournent à de mauvais sens pour leur propre ruine 2. D’où viennent, s’écrie saint Augustin, tant d’hérésies qui nous affligent si ce n’est de la fausse interprétation de l’Ecriture ? Jésus-Christ n’a pas promis son assistance à tous ceux qui liraient la Bible, mais il a dit aux Apôtres et à leurs successeurs : Voici que je suis avec vous tous les jours jusqu’à la consommation des siècles 3 ; et encore : Quiconque n’écoute pas l’Église, qu’il te soit comme un païen et un publicain 4.
Le verbe s’est fait chair.
« Vous vous étonnez, » dit saint Augustin, « qu’une telle parole ait jamais pu être dite du Verbe de Dieu ; mais le Verbe de l’homme ne s’incarne-t-il pas, lui aussi, malgré la distance infinie qui sépare la nature humaine de la nature divine ? Ma parole était tout à l’heure en moi, elle était purement spirituelle et parfaitement distincte des mots et du son de ma voix ; mais voici que j’ai résolu de la produire au dehors ; elle s’incarne aussitôt, elle devient une parole sonore que d’autres hommes peuvent entendre. Ma parole était en moi, elle était esprit, et elle est devenue intelligible aux autres par ma voix. Le Verbe de Dieu était dans le sein du Père et il s’est incarné dans une forme humaine, afin de se manifester à tous. Comment repoussez-vous le mystère du Verbe fait chair, alors que vous ne parvenez pas à comprendre le mystère du verbe humain ? »
Mais ce n’est là, en vérité, qu’une bien faible image. L’incarnation est l’un des plus impénétrables mystères de la foi. Elle n’est pas contraire à la raison, elle la dépasse. Que de choses, que de mobiles, dans les actions humaines, demeurent incompréhensibles pour nous ! Et l’on voudrait que le plus grand acte d’amour d’un Dieu n’eût point d’obscurités !
Jésus-Christ est à la fois vrai Dieu et vrai homme ; en lui les deux natures, étroitement unies, ne forment qu’une seule et même personne, qui est la seconde personne de la Sainte Trinité. Voilà ce que nous apprend la révélation. L’Église a rejeté Arius de sa confession, parce qu’il prétendait que la personne divine qui s’est faite homme, le Verbe, n’était pas Dieu au même titre que son Père. Elle a condamné également Apollinaire, qui niait que Jésus-Christ ait pris véritablement une âme humaine ; Nestorius, qui enseignait que la personne de Jésus-Christ était distincte de la personne divine ; Eutychès, qui niait que deux natures distinctes existassent en Jésus-Christ ; enfin les Monothélites, qui refusaient d’admettre dans le Fils de Dieu une volonté humaine à côté d’une volonté divine.
C’est en Jésus-Christ qu’est apparue bénignité et la charité de Dieu, notre salut 1 , et nous pouvons lever les yeux vers lui avec condiance et avec joie, car il est Dieu, et son Cœur, qui est un cœur d’homme, sent nos misères et y compatit.
§5. QUI A ÉTÉ CONÇU DU SAINT-ESPRIT.
Jésus-Christ ayant résolu de se faire semblable à nous en toutes choses, à l’exception du péché, est apparu au milieu du monde sous les traits d’un faible enfant. Dieu a fait un miracle pour opérer ce prodigieux abaissement d’amour, sans que la moindre atteinte fût portée à la pureté sans tache de la Vierge immaculée.
Marie est véritablement Mère de Dieu, parce qu’en Jésus, son Fils, il n’y a qu’une personne, et que cette personne est divine. On ne peut honorer Jésus sans rendre hommage à Marie. Rendre un culte à la Vierge-Mère, c’est proclamer la divinité de l’Homme-Dieu. La Mère de Dieu est aussi notre mère.
Le Christianisme n’est autre chose que l’histoire de la compassion infinie d’un Dieu, s’inclinant vers sa pauvre créature faible et dénuée de tout bien. Jésus, épiant pour ainsi dire tous les besoins de notre nature, tous les désirs de notre cœur, a cherché à les satisfaire et à les sanctifier. Voilà pourquoi il a institué des chefs visibles pour nous conduire dans la voie du salut ; pourquoi il nous a donné en sa personne sacrée un modèle achevé que nous puissions nous appliquer à reproduire ; pourquoi il nous est apparu d’abord sous les traits d’un petit enfant, puis d’un adolescent laborieux et soumis et d’un juste rempli de la crainte de Dieu ; pourquoi il a livré son corps à la souffrance et son âme à d’amères angoisses ; pourquoi enfin, expirant sur une Croix, il a pensé encore à nous donner sa Mère.
L’homme perd aisément courage ; il s’épouvante très vite et s’alarme aisément ; parfois le désespoir le tente, et alors il n’est plus qu’un enfant, sans direction et sans force. Pour relever son courage et ranimer son cœur abattu, Dieu avait déjà mis au sein de la famille un trésor de compassion tendre et d’abnégation infinie, le cœur d’une mère. Jésus a fait davantage ; du haut de sa Croix, il nous a légué sa propre Mère ; en mourant, il a fait adopter à Marie l’humanité tout entière, et il a voulu que ses dernières paroles fussent le garant de cette maternité ineffable et surnaturelle. Jésus-Christ est notre frère, notre vie ; il est notre chef, et nous sommes ses membres ; il s’est incarné dans le sein de la bienheureuse Vierge Marie par un miracle de la toute-puissance divine, et Marie est devenue la Mère de la grande famille humaine. C’est l’un des dons les plus magnifiques et les plus touchants que nous ait faits le Cœur de notre Sauveur. Jésus et Marie nous apparaissent toujours ensemble à Bethléem, à Cana, au Calvaire, au berceau de l’Église naissante. Que l’homme ne sépare donc point ce que Dieu a si merveilleusement uni ! Loin de nous détourner de notre Rédempteur, le culte que nous rendons à la très sainte Vierge ne fait que nous en rapprocher davantage.
§6. EST NÉ DE LA VIERGE MARIE
§7. QUI A SOUFFERT SOUS PONCE-PILATE, A ÉTÉ CRUCIFIÉ, EST MORT,
A ÉTÉ ENSEVELI.
Parmi les actes les plus étonnants et les plus héroïques qui se sont accomplis en ce monde et qui s’y accompliront jamais, la douloureuse Passion de Jésus-Christ est celui qui a le plus contribué à la gloire de Dieu et au bien de l’humanité.
Aux yeux des gens du monde, pour qui les richesses et les jouissances de la terre sont tout, les souffrances de l’Homme-Dieu restent incompréhensibles. Ne soyez donc pas étonnés de les entendre, surtout ceux qui sont le plus enfoncés dans la matière, se moquer du plus auguste de nos mystères et se refuser à croire que Dieu ait pu livrer son Fils unique à la mort. Parce qu’ils n’ont de penchant que pour les biens terrestres, ils mesurent les choses divines à leurs pauvres petites idées. Cependant, s’ils réfléchissaient, ils comprendraient que cette terre, à laquelle ils consacrent tous leurs soins, toutes leurs affections, est bien peu de chose, malgré son industrie et ses sciences, ses découvertes et ses fameux champs de bataille ! Quelle place occupe-t-elle en effet dans l’ensemble de ce vaste univers ? Et l’homme, si petit et chétif, voudrait que Dieu, l’Infini, eût les mêmes pensées que lui ! Et il insulte à l’amour infini, parce qu’il lui voit opérer des prodiges qu’il n’est pas capable de comprendre ! On conçoit qu’un tel orgueil ait irrité le ciel et attiré les châtiments de la colère de Dieu.
La Croix est le centre et le résumé de notre foi. Le Christianisme est la religion de la passion et de la mort de Jésus-Christ. En se rendant pour nous, obéissant jusqu’à la mort, Notre Seigneur a offert à son Père, en expiation de notre désobéissance et de l’injure faite à Dieu, une pleine ou plutôt une surabondante réparation, et la peine portée contre nous a été levée. Lui, qui n’a commis aucun péché, a lui-même porté en son corps nos péchés sur le bois, afin que, morts aux péchés, nous vivions à la justice. C’est par ses meurtrissures que nous avons été guéris 1. Que sont les révélations de la grandeur et de la bonté de Dieu dans les merveilles de la nature auprès des manifestations de l’infinie charité de Dieu sur la Croix ? C’est à la vue de la Croix que la notion de l’infini s’est vraiment révélée à nos âmes ; c’est elle qui nous a fait comprendre l’amour infini, la récompense infinie, le châtiment infini ! On ne peut mesurer et comprendre la Croix qu’avec une mesure infinie.
Pour nous racheter, Jésus n’était pas obligé d’endurer tant de suplices. S’il a voulu les subir, ç’a été pour exciter jusque dans les cœurs les plus coupables, les plus écrasés sous le poids honteux du péché, la douce confiance, l’’espérance qui ne trompe pas, le sentiment de la nécessité de l’expiation ; ç’a été encore pour souffrir avec tous ceux qui souffrent et pour les porter à l’immolation volontaire ; ç’a été enfin pour glorifier son Père par une oblation plus complète et pour nous révéler toute l’étendue de sa charité ; car le sacrifice est le langage le plus éloquent de l’amour. Quand il voulut révéler quelque chose de sa puissance et de sa sagesse infinies, Dieu dit une parole, et l’univers sorti du néant. Quand il voulut nous faire comprendre son amour, Dieu envoya son Verbe et Jésus répandit tout son sang sur la Croix. Comment, sans le Calvaire, aurions-nous pu jamais même pressentir l’immense compassion de notre Dieu pour notre misère ?
Après la mort de Jésus, sa très sainte âme descendit dans le lieu où les justes de l’ancienne Loi attendaient le moment de leur délivrance 1.
Cet article de notre foi nous rappelle que le Sauveur veut le salut de tous les hommes : Dieu veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité 2.
Cette volonté de Dieu se manifeste presque toujours dans le cours ordinaire des événements, et suit le développement régulier des lois naturelles. Une intervention directe de Dieu dans ces lois, c’est-à-dire un miracle, n’est jamais qu’un fait exceptionnel, Dieu ne s’est pas engagé, par exemple, à prolonger par miracle la vie du pécher jusqu’à ce qu’il plaise à celui-ci de se convertir. Mais pour venir en aide à notre misère, il a voulu que nous ne manquions jamais de ces secours extérieurs qui, d’une manière générale et par des moyens humains, mettent à la portée de tous la vérité infaillible et les canaux de la grâce. C’est pourquoi, tout d’abord, il a fondé l’Église, lui donnant la mission d’appeler toutes les âmes au salut. De plus, par une providence pleine d’amour, il veille lui-même au salut de tous les hommes de bonne volonté ; il ferait un miracle plutôt que de laisser se perdre une âme qui, dans la mesure de ses forces, se montre docile à la voix intérieure qui la pousse vers le bien. De son côté, Jésus, le Bon Pasteur, le Bon Samaritain, accorde à tous, même au pécheur le plus endurci, plus de grâces qu’il ne lui en faut pour opérer son salut. Enfin il a donné à sa doctrine tant de clarté et tant de preuves qui l’appuient, qu’il n’y a qu’un mauvais vouloir bien déterminé qui puisse refuser de s’y soumettre. C’est ordinairement l’inconduite qui amène le mépris et la perte de la foi. La foi est toujours en sécurité dans une vie chaste et dans un cœur pur, et c’est là une preuve nouvelle de la divinité.
§8. QUI EST DESCENDU AUX ENFERS, LE TROISIÈME JOUR, EST RESSUSCIÉ D’ENTRE LES MORTS, EST MONTÉ AU CIEL.
§9. QUI EST ASSIS À LA DROITE DE DIEU, LE PÈRE TOUT-PUISSANT,
D’OÙ IL VIENDRA JUGER LES VIVANTS ET LES MORTS.
Il était jute que Jésus participât, même en tant qu’homme, à la gloire de Dieu son Père. Comme Dieu, il est présent partout ; comme Dieu et homme tout ensemble, il est d’abord au ciel ; puis, n’ayant pas voulu nous abandonner, dans les luttes et les cruelles épreuves de cette vie, il continue à habiter encore parmi nous, mais d’une manière mystérieuse, dans le Très Saint Sacrement de l’autel. Il veut que nous livrions, pour ainsi dire sous ses yeux, le saint combat qui doit nous ouvrir le ciel.
Les humiliations de Jésus se perpétuent ainsi sur la terre ; il est persécuté, honni, méprisé dans son Église sainte et dans tous ceux qui lui sont fidèlement attachés : pour lui, la terre sera toujours un Calvaire, et cela jusqu’à la fin du monde !
Mais, au dernier jour, Jésus et les siens recevront le prix tant mérité de leur victoire, tandis que le vice, qui avait paru triompher, sera précipité dans un abîme de honte.
Dieu doit à son Fils unique cette réparation éclatante. La gloire de Jésus se manifestera dans la récompense de ceux qui lui auront été fidèles et dans la confusion de ceux qui auront refusé de le servir. Alors ce ne sera plus seulement son amour qui se révélera aux hommes, mais sa justice. Chacun recevra selon son mérite, et le sentiment d’équité que Dieu a mis au plus profond de notre âme ne sera plus blessé par le spectacle de la prospérité du méchant et de la souffrance du juste. Alors les impies diront en eux-mêmes dans l’angoisse de leur esprit : Les voilà donc ceux que nous avions pris en mépris et qui étaient l’objet de nos outrages ! Nous, insensés, nous estimions leur vie une folie, et leur fin un opprobre ! Et les voilà comptés parmi les fils de Dieu, et leur part est parmi les saints 1.
Le Saint-Esprit est la troisième personne divine, vrai Dieu comme le Père et le Fils.
Les trois personnes de la Sainte Trinité ne forment qu’un seul et même Dieu, parce qu’il n’y a point entre elles une simple ressemblance ou analogie, mais une unique et même nature divine. En tant que personnes, elles sont distinctes ; le Père existe de toute éternité par lui-même ; le Fils est engendré par le Père de toute éternité ; le Saint-Esprit procède éternellement de l’un et de l’autre.
Il est impossible à notre faible intelligence, qui n’arrive que si imparfaitement à connaître même les choses créées, de comprendre le mystère de la Sainte Trinité, car dans la nature nous ne rencontrons rien d’analogue ; elle ne nous fournit que des comparaisons tout à fait imparfaites, telles que l’union du feu, de la lumière et de la chaleur ; une parole entendue à la fois par trois personnes ; la mémoire, l’intelligence et la volonté dans l’âme humaine, etc.
Certains hérétiques on essayé d’expliquer ce mystère en disant que Dieu avait trois différentes manières de se communiquer à nous, comme un homme peut tour à tour nous apparaître soldat, musicien ou savant. Mais l’Église, pour réfuter leur erreur, a appelé notre attention sur des textes précis de la Sainte Ecriture qui révèlent dans la Sainte Trinité, trois personnes douées d’attributs distincts : comme par exemple en ce passage de l’Evangile : Quand sera venu le Paraclet, que je vous enverrai du Père, l’Esprit de vérité, qui procède du Père, il rendra témoignage de moi 1.
Pourquoi Dieu nous propose-t-il des mystères que notre intelligence ne peut comprendre ? Parce que nous n’avons pas été créés, nous autres hommes, pour tout comprendre, mais pour nous soumettre à Dieu en toutes choses, par conséquent dans l’usage de notre intelligence, comme dans tout le reste. Mais la véritable raison des mystères, c’est le dessein d’amour que Dieu a formé de nous élever du sein de notre bassesse jusqu’à la participation de sa félicité. Personne ne songe à confier ses secrets de famille à un pauvre serviteur rencontré sur la route, et cependant Jésus-Christ nous dit : Je ne vous appellerai plus serviteurs, parce que le serviteur ne sait pas ce que fait son maître, mais je vous ai donné le nom d’amis, parce que tout ce que j’ai entendu de mon Père, je vous l’ai fait connaître 2. Souvenez-vous de cette autre parole de l’Evangile : Bienheureux celui qui ne sera point scandalisé à cause de moi 3 ! Notre félicité éternelle consistera à voir Dieu tel qu’il est et face à face. Pour mériter un pareil bonheur, croyez en lui ici-bas comme il l’a voulu, c’est-à-dire en renonçant à pénétrer le mystère insondable où il s’enveloppe.
Quelle folie de se rebuter de l’obscurité des dogmes chrétiens ! La nature n’a-t-elle plus pour nous d’énigmes ? Expliquez-les donc avant de repousser ce qui est au dessus de la nature ! L’homme n’est-il pas continuellement obligé de s’en rapporter aux lumières d’autrui ? Et qui plus que Dieu mérite d’être cru sur parole ?
L’œuvre de notre sanctification est particulièrement attribuée au Saint-Esprit. Jésus-Christ, il est vrai, nous a mérité et préparé la grâce nécessaire au salut, mais le Saint Esprit la communique à nos cœurs et l’y perfectionne ; il nous purifie de ne nos péchés, il nous rend justes et agréables à Dieu.
Jésus-Christ a tout particulièrement envoyé le Saint-Esprit à son Église, pour l’instruire invisiblement, la sanctifier, la guider, et surtout lui communiquer le trésor des grâces qu’il lui a méritées.
§10. JE CROIS AU SAINT-ESPRIT.
Il était certain d’avance que le Sauveur du monde instituerait une Église visible.
En effet, partout et toujours, Dieu s’est servi de moyens naturels pour atteindre la fin surnaturelle qu’il se proposait. Pourquoi eût-il fait exception à cette règle lorsque la foi de ses enfants était en cause ? Pourquoi eût-il voulu les instruire et les gouverner par une intervention directe ? N’a-t-on pas toujours vu les hommes se soumettre librement à une autorité visible et la charger de maintenir entre eux l’unité d’un même esprit ? Si Jésus-Christ n’eût pas institué l’Église, s’il n’eût chargé saint Pierre et ses successeurs de la gouverner jusqu’à la fin des temps, son œuvre eût été livrée d’avance aux disputes des hommes. Le moyen le plus sûr et le plus naturel de sauvegarder l’union, c’était l’établissement d’un pasteur suprême, investi du pouvoir des clefs, chargé de conduire le troupeau des fidèles. Le Pape est donc la pierre angulaire, le rocher inébranlable de la société chrétienne, le principe de la force et de la stabilité de l’Église du Sauveur.
Le Christianisme nous a été donné d’en haut. Il ne doit rien à l’État ni à la société civile ;
De plus, le Verbe nous est apparu sous une forme visible, il a pris un corps semblable au nôtre. Il n’entrait donc pas dans les desseins de Dieu de n’avoir avec nous que des rapports directs et spirituels ; il a manifesté par là qu’il voulait que les hommes reçussent la vérité par des moyens extérieurs, sous une forme déterminée et précise. Si l’autorité enseignante, visible et infaillible de Jésus-Christ avait disparu avec lui, le plan même de l’Incarnation eût été renversé ; Dieu aurait continué son œuvre autrement qu’il ne l’avait commencée : l’idée primitive eût été abandonnée, la révélation fût restée à peu près inutile ; elle eût manqué son but.
L’Église visible est placée entre l’éternité et le temps, non comme une barrière de séparation, mais comme un trait d’union qui les rattache l’une à l’autre. Sans son intervention, le monde éternel disparaîtrait peu à peu à nos regards, et le monde temporel n’aurait plus de raison d’être.
Mais la question est de savoir si Jésus-Christ a réellement institué pours ses fidèles une Église visible, c’est à dire une autorité spirituelle et humaine à la fois.
Oui, cette Église existe, et nous la voyons de nos yeux ; elle s’appelle catholique parce que sa mission s’étend à la terre entière ; romaine parce que son chef visible réside à Rome, dans la cité même où Pierre, le rocher indestructible sur lequel l’Église s’appuiera jusqu’à la fin des temps, a vécu et enseigné durant les dernières années de sa vie. Cette Église, la science historique le confesse, est l’arbre vénérable planté par le Rédempteur lui-même, et les historiens pourraient nous montrer, siècle par siècle, sur son tronc robuste et toujours le même, les plaies cicatrisées d’où sont tombées successivement les branches, maintenant desséchées et flétries, de l’hérésie. L’unité et la stabilité que vous admirez en elle viennent du fondement posé par Jésus-Christ même, tandis qu’en dehors d’elle règne la plus grande confusion. Ce fait indiscutable prouve contre protestantisme que le Rédempteur n’a pas voulu assurer l’union des fidèles seulement par l’opération intérieure du Saint-Esprit, mais encore par le canal d’une autorité doctrinale, visible et indéfectible.
Nous trouvons dans la Sainte Ecriture la confirmation de tout ce que nous venons de dire. Nous y voyons, en effet, que Jésus-Christ a transmis aux Apôtres sa propre autorité et qu’il les a envoyés prêcher et baptiser par toute la terre, leur confiant la mission de conduire les nouveaux chrétiens sous la promesse que Jésus-Christ a faite à son Église de demeurer avec elle tous les jours jusqu’à la consommation des siècles, c’est-à-dire de la maintenir dans la vérité, et, en premier lieu, d’y maintenir jusqu’à la fin des temps le chef suprême qui en sera toujours le fondement inébranlable.
De plus, l’Ecriture nous apprend que les Apôtres, après la mort de leur Maître, consacrèrent évêques, les plus anciens d’entre les disciples, les instituèrent chefs et pasteurs des nouvelles communautés chrétiennes et leur commandèrent de consacrer et d’ordonner à leur tour d’autres évêques 1.
C’est donc à bon droit que l’Église catholique romaine revendique pour elle cet autre caractère de la véritable Église et instituée par Jésus-Christ : l’apostolicité. L’Église catholique romaine est apostolique parce qu’elle enseigne la même doctrine qu’ont enseignée les Apôtres, parce qu’elle a les mêmes sacrements qu’au temps des Apôtres, parce que la succession de ses évêques remonte jusqu’aux Apôtres.
Enfin, avec l’unité, la catholicité et l’apostolicité, l’Église romaine possède encore la dernière des quatre marques auxquelles on peut reconnaître l’Église fondée par Jésus-Christ : la sainteté. L’Église catholique, romaine est sainte : dans son chef invisible qui est Jésus-Christ ; dans sa doctrine infaillible qui conduit à la sainteté ; dans ses membres qui ont reçu la grâce de la sainteté et qui, par la grâce du Baptême et la rémission des péchés, se sont revêtus de Jésus-Christ ; dans la célébration légitime du Saint Sacrifice, et dans l’usage salutaire des Sacrements, par lesquels Dieu opère la véritable sainteté.
Les Apôtres prêchèrent constamment l’obéissance au pouvoir établi, mais nous ne voyons nulle part que la juridiction ecclésiastique se soit jamais préoccupée de faire sanctionner ses actes par l’État, car les Apôtres avaient reçu directement de Dieu mission de gouverner l’Église. On a même souvent vu la religion chrétienne s’introduire dans un pays contrairement aux lois de l’État. Jésus-Christ n’a pas chargé le pouvoir civil de gouverner son Église ; il a voulu, au contraire, que les supérieurs ecclésiastiques fussent indépendants de l’État. Pourquoi cela ? Parce qu’il ne voulait pas que les détenteurs de l’autorité temporelle missent l’Église au service de leurs intérêts temporels.
Dès les temps apostoliques, les communautés chrétiennes ont été étroitement unies entre elles sous l’autorité du chef unique de l’Église. Comme saint Pierre, et bien que ses subordonnés, les Apôtres, étaient de véritables supérieurs ecclésiastiques. Dans les circonstances graves, ils s’assemblaient en Concile et prenaient en commun des décisions, selon les nécessités du moment. Ce qu’elle fit alors, l’Église le répétera jusqu’à la fin du monde. Ses Pères et ses Docteurs ont déclaré solennellement au Concile d’Ephèse, en 415, que saint Pierre, prince et chef des Apôtres, était la pierre fondamentale sur laquelle l’Église catholique avait été fondée, et que les siècles chrétiens avaient reconnu cette vérité. Le Concile général de Florence (1438), rappelant les actes des Conciles précédents et les Constitutions ecclésiastiques, déclara à son tour, mille an plus tard, que la suprématie de l’évêque de Rome, le Pape, s’étend sur le monde entier, et que le Pape est le successeur de sain Pierre, le représentant de Jésus-Christ sur la terre, le prince des Apôtres, le chef de l’Église universelle, le Père et le docteur de tous les chrétiens, parce que, dans la personne de saint Pierre, Notre-Seigneur lui a transmis ses pleins pouvoirs pour enseigner et conduire son Église.
Plus tard, lorsque fut soulevée la question de savoir s’il pourrait jamais arriver que ce Père et ce Docteur de tous les fidèles pût infuser un enseignement erroné à l’Église, le vingtième Concile général, celui du Vatican (1870), déclara que, toutes les fois que le Pape enseigne l’Église tout entière en matière de foi ou de morale, il est à l’abri de toute erreur, en vertu de l’assistance divine qui lui a été promise. C’est ce qu’il faut entendre par infaillibilité du Pape 1.
Mais n’est-ce pas là une doctrine nouvelle ?
Quand même le mot serait nouveau (que de fois, dans le cours des siècles des mots nouveaux n’ont-ils pas été inventés par l’Église pour flétrir des erreurs nouvelles !) la doctrine dont il s’agit est aussi ancienne que l’Église, car, de tout temps, la soumission réelle et sincère aux décrets du Pape en matière de foi, a été considérée comme le devoir sacré des fidèles. Saint Ambroise disait au quatrième siècle : Là où est Pierre, là est l’Église.
Tout chrétien est-il obligé d’adhérer à la véritable Église ?
Puisque Dieu a voulu que l’Église fût pour nous la médiatrice de salut apporté sur la terre par Jésus-Christ, tous les hommes sont évidemment obligés de lui appartenir, extérieurement et intérieurement. Jésus-Christ nous en avertit clairment : Si quelqu’un n’écoute pas l’Église, qu’il te soit comme un païen et un publicain 1. Et ailleurs : Celui qui ne croira point, sera condamné 2. Jésus-Christ parle ici de l’enseignement des Apôtres et de leurs successeurs.
Quiconque méprise l’Église, méprise Jésus-Christ. Aussi les évêques d’Afrique déclarèrent-ils en 412, au Concile de Cirta 3, par l’organe de saint Augustin, « que celui qui est en dehors de l’Église est, par là même, séparé du Christ et que, sa conduite fût-elle irréprochable, il n’a pas la vie en lui parce que la colère de Dieu repose sur lui ». Ces paroles, que le grand docteur adresse à un pélagien, l’Église les redit encore aujourd’hui, rappelant à l’unité toutes les âmes qui ne lui appartiennent plus et ne se lassant pas de leur répéter : « Revenez à nous, car vos ancêtres ne professaient point la foi que vous avez maintenant ; vous êtes nés d’une Église qui enseigne le contraire de ce que vous enseignez aujoud’hui. » Saint Cyprien, au troisième siècle, refusa de prendre connaissance de la doctrine de Novatien aussitôt qu’il eut appris que celui-ci n’enseignait pas en union avec l’Église. « Qu’il soit tout ce qu’il voudra, » s’écria-t-il, « il n’est pas chrétien du moment qu’il n’appartient pas à l’Église du Christ. »
Les caractères de la véritable Église de Jésus-Christ sont-ils faciles à reconnaître ?
Oui. La véritable Église est celle que, malgré la sainteté de son Chef et de ses membres, malgré la pureté de sa doctrine, vous voyez aujourd’hui diffamée, persécutée dans le monde entier, calomniée et méconnue, comme le fut durant sa vie Jésus-Christ, son divin fondateur ; celle dont les chefs visibles ont reçu directement leur mission des Apôtres ; celle que Jésus-Christ a voulue universelle, et qui s’étend en effet sur toute la surface de la terre, conformément à sa promesse ; enfin, c’est l’Église visible, unie dans la même foi, dans une commune charité, dans la Croix du Sauveur et dans l’obéissance au chef unique qu’il lui a donné. Si nous nous trompons, ô Seigneur, c’est vous-même qui nous avez induits en erreur, car l’existence et la divinité de l’Église catholique reposent sur des preuves si incontestables, elles ont des fondements si solides et si saints qu’elle ne peut avoir été établie que par vous. Oui, en vérité, Seigneur, si nous sommes dans l’erreur, c’est vous-même qui nous avez trompés !
Mais n’y a-t-il pas dans l’Église catholique des abus et des scandales ?
Sans aucun doute. Il y en avait dès le temps des Apôtres, et il en existe encore aujourd’hui.
Jésus-Christ nous l’avait prédit, nous promettant en même temps qu’en dépit de tous les scandales, l’Église resterait jusqu’à la fin des temps à la hauteur de sa sainte mission. Cessez, dit saint Augustin aux incrédules de son temps, cessez de diffamer l’Église, car elle est la première à flétrir tous les abus que lui reprochez, et elle travaille sans relâche à ramener au bien ses enfants égarés. Pourquoi ne voulez-vous voir que le mal ? Cherchez plutôt les grappes de raison dans la vigne, et le bon grain dans l’aire.
L’Église catholique est la seule société chrétienne qui vienne en droite ligne des Apôtres par une transmission de pouvoir non interrompue et constatée par l’histoire ; la seule qui soit en possession de la doctrine enseignée par Jésus-Christ lui-même : la seule qu’il ait chargée de conduire les hommes dans la voie du salut éternel. Quelle secte chrétienne peut se glorifier d’une aussi grand nombre d’enfants ? Laquelle oserait élever la prétention d’être l’Église universelle, promise au monde par le Rédempteur ? Si l’Église catholique romaine n’est pas l’Église fondée par Jésus-Christ, où donc est cette Église ? Où la trouverons-nous ?
On prétend qu’avant le protestantisme l’Église catholique avait erré sur la doctrine durant un temps assez prolongé et sur des points essentiels. Mais alors comment, pendant un si long intervalle, Jésus-Christ a-t-il manqué à la promesse formelle qu’il avait faite de demeurer avec son Église jusqu’à la consommation des siècles ? 1
D’ailleurs toutes les sociétés chrétiennes séparées sont obligées d’avouer qu’elles ne doivent leur existence qu’à l’acte révolutionnaire qui les a arrachées de l’Église primitivement instituée. Elles croient justifier cet acte en disant qu’à ce moment l’Église catholique était plongée dans des erreurs tellement graves qu’une scission avait paru inévitable. Cela revient à dire que la promesse du Sauveur touchant l’assistance permanente du Saint-Esprit avait été vaine. N’est-ce pas blasphémer que de soutenir sérieusement une thèse semblable ?
Gardez-vous toutefois, de condamner personne. Un chrétien non catholique 1 qui, sans qu’il y ait de sa faute, ne se croit pas tenu de rentrer dans le giron de l’Église et s’acquitte d’ailleurs le mieux possible de ce qu’il considère devant Dieu comme son devoir, sera sauvé à cause des vérités empruntées à l’Église catholique qu’ont retenues ceux-là mêmes qui se sont séparés de sa communion. Mais ce chrétien, supposé en état de grâce, et n’appartenant ainsi, d’après l’expression consacrée, qu’à l’âme de l’Église, reste néanmoins privé de beaucoup de grâces inappréciables.
C’est pour le Ciel que notre Mère la Sainte Église nous élève. De même que des parents soucieux de leur devoir proposent à leurs enfants beaucoup de choses qui leur semblent parfois difficiles, et dont des enfants abandonnés à eux-mêmes se trouvent dispensés, ainsi l’Église porte ses enfants à la pratique de beaucoup de vertus totalement ignorées des âmes qui ne lui appartiennent pas.
C’est une grâce inappréciable que d’être catholique. Nous ne saurions assez en remercier Dieu, ni mettre trop d’empressement à profiter de ce bienfait, dont nous ne connaîtrons tout le prix qu’à l’heure de notre mort. Il fait bon mourir catholique ! Ne passez aucun jour sans prier pour les pauvres chrétiens séparés de l’Église.
Evitez la société de ceux qui, par un acte voulu et personnel, se sont séparés de notre Mère bien-aimée, la sainte Église catholique romaine. Quel enfant bien né se plairait dans la compagnie de ceux qui insultent sa mère ?
Mais l’unité dans laquelle vivent les enfants de l’Église ne cesse pas au jour de la mort, pour ceux-là du moins qui se trouvent alors en état de grâce. Intimement unis à Jésus-Christ au dernier moment de leur vie terrestre, ils lui resteront éternellement unis dans le ciel. A cause de cette intime union avec Jésus-Christ par la grâce sanctifiante, les âmes souffrantes du Purgatoire et l’Église triomphante du Ciel sont en étroite communion avec l’Église militante de la terre, et ces trois Églises ne forment qu’une même société invisible dont Jésus-Christ est le chef, et dont les membres sont tous les fidèles de cette vie et de l’autre.
L’union des trois parties de ce corps mystique de Jésus-Christ reçoit dans le symbole de foi le nom de Communion des Saints. Par elle se justifient le culte et l’intercession des saints, l’efficacité de nos suffrages pour les défunts, et, d’une manière générale, toute la doctrine de l’utilité des bonnes œuvres non seulement pour notre bien spirituel particulier, mais encore pour celui de notre prochain et de toute l’Église.
Ne confondez pas le corps mystique de Jésus-Christ avec ce qu’on appelle le corps de l’Église.
Le corps mystique, dont Jésus-Christ est la tête, a pour membres tous ceux qui appartiennent à l’une des trois Églises dont nous venons de parler.
On appelle corps de l’Église les enfants de l’Église militante qui, étant baptisés, lui appartiennent par la foi et la soumission à son autorité ; l’âme de l’Église comprend ceux qui sont unis par la foi, mais encore par l’état de grâce. Tout chrétien a l’obligation d’appartenir à la fois au corps et à l’âme de l’Église.
Pour être sauvé, il faut appartenir au moins à l’âme de l’Église, la bonne foi pouvant excuser un chrétien non catholique de ne pas appartenir à son corps.
Un catholique coupable de péché grave n’appartient plus qu’au corps de l’Église. Mais le dogme de la rémission des péchés nous apprend que, durant le cours de cette vie terrestre, quels que soient le nombre et la gravité de ses péchés, tout enfant de l’Église peut renaître à la vie de la grâce, et, par le sacrement de pénitence, redevenir un membre vivant du corps mystique de Jésus-Christ.
§11. JE CROIS LA SAINTE ÉGLISE CATHOLIQUE,
LA COMMUNION DES SAINTS, LA RÉMISSION DES PÉCHÉS.
La raison suffit à nous convaincre que la résurrection des corps est possible. En effet, si la puissance de Dieu les a tirés du néant, lui sera-t-il plus difficile de les rappeler la vie ? Mais seule révélation chrétienne nous donne la certitude que notre corps ressuscitera, bien que dans des conditions toutes différentes de celles de la vie présente : Il est semé corps animal, il ressuscitera spirituel 1.
Quelles seront les nouvelles conditions de la vie future ?
Nous ne le savons pas exactement ; mais répétons souvent les paroles de Job : Je verrai mon Dieu dans ma chair ; cette espérance repose dans mon sein 2.
Respectez d’autant plus votre corps que l’ennemi vous pousse avec plus d’insistance à l’avilir.
Au temps de Dioclétien, lorsque les persécuteurs des chrétiens voulurent contraindre sait Gordien à renier la foi, il leur dit avec intrépidité : « Quand même vous mettriez ce corps en pièces, je m’en mettrais peu en peine, car au jour de la résurrection je suis certain d’apparaître de nouveau dans un corps vivant et glorieux. »
Mais beaucoup de savants n’affirment-ils pas, de nos jours, que tout finit à la mort et que l’homme n’a pas d’âme ?
Que ne dit-on pas pour faire taire les alarmes d’une conscience coupable ? Mais nommez-moi un seul homme vraiment bon, loyal et chaste, qui ait jamais soutenu une opinion semblable !
S’il est une chose certaine, c’est que la vie présente ne peut être considérée que comme le premier degré d’une existence à venir. S’il en était autrement, les conditions dans lesquelles nous sommes nés insulteraient à la vérité et à la justice.
L’homme diffère de l’animal en ce qu’il possède une âme immortelle. Vous êtes obligés d’en convenir, à moins que vous ne doutiez de votre raison, de votre liberté, de votre conscience. Les facultés intellectuelles de l’homme sont trop bornées pour qu’il puisse raisonnablement croire que son être appartient à la nature divine, comme les panthéistes voudraient le lui persuader ; d’autre part, elles sont trop puissantes pour qu’il puisse douter qu’il est par sa nature au-dessus des animaux, comme les matérialistes voudraient le nier.
Par le fait seul que l’homme vit, sent, perçoit, pense, l’existence de son âme est prouvée. Et qu’est-ce que l’âme, sinon le principe de toutes les diverses manifestations de la vie ?
L’âme humaine, par cela même qu’elle pense aux choses immatérielles, qu’elle tend librement, poussée par l’instinct de sa conscience, vers des biens abstraits, est nécessairement immatérielle, c’est-à-dire indépendante de la matière. Aussi tous les hommes qui réfléchissent s’accordent-ils à dire que la vraie valeur de l’homme n’est point du domaine matériel, mais d’un domaine supérieur, celui de l’esprit.
Au plus intime de sa vie, l’âme humaine sent qu’elle est esprit, et donc immortelle par sa nature. Dieu, qui a partout déclaré ses volontés en termes si clairs, aurait-il mis dans nos cœurs des aspirations vaines, condamnées à être toujours déçues ?
Un naturaliste célèbre a dit : « Quand on vient à considérer les épreuves de la vertu et la prospérité du vice, le besoin de voir un jour l’équité rétablie se fait impérieusement sentir à notre âme ; car nous ne voyons nulle part que le Créateur ait livré une partie quelconque de son œuvre à un désordre aussi choquant. »
Dites-vous souvent à vous-même : Après cette vie de déceptions, de souffrances , d’injustices, il y en aura une autre dans laquelle « chacun recevra sa propre récompense selon son propre travail » 1.
§12. JE CROIS LA RÉSURRECTION DE LA CHAIR ET DE LA VIE ÉTERNELLE.
L’homme, créature raisonnable, est naturellement porté, par les instincts les plus élevés de sa nature, à admirer les vérités de la foi ; chrétien, il les reçoit parce que Dieu nous les a révélées : Il croit.
Croire, c’est adhérer à une vérité parce que Dieu nous l’a proposée. Notre raison, à l’aide de laquelle nous discernons le vrai du faux, ne nous sert plus alors que de fil conducteur ; elle nous fait reconnaître et avouer que Dieu, qui est la Vérité même, nous a réellement découvert ses desseins, et ne saurait nous tromper. Le vrai principe de la foi du chrétien n’est pas la raison, c’est Dieu 1.
La foi est un acte de l’intelligence, parce qu’elle se rapporte à la vérité ; mais l’assentiment de notre esprit se produit par un acte de notre libre volonté, avec le secours de la grâce que Dieu ne refuse à personne.
La sagesse de Dieu a voulu que la foi fût surtout une question de bonne volonté. Nous pouvons donner ou ne pas donner notre adhésion à la vérité révélée : premièrement, parce que nous sommes libres de nous soumettre à Dieu ou de nous laisser diriger par ce que nous appelons notre intérêt personnel ou par tout autre motif humain ; secondement parce que Dieu a voulu que la vérité fût ici-bas un mélange de lumière et d’obscurité, afin que la vertu de l’homme, étant éprouvée, pût devenir méritoire ; troisièmement enfin, parce que la foi, comme la science, ne peut s’acquérir sans un certain effort d’esprit auquel il faut nécessairement s’astreindre. L’ignorance, l’une des causes les plus fréquentes de l’incrédulité, n’est souvent, comme l’expérience le prouve, que le résultat d’une mauvaise volonté positive.
L’orgueil, l’esprit d’argutie et de fausse critique, la lecture de livres, de journaux contraires à la religion, la fréquentation de personnes ou l’assistance à des réunions dominées par des influences plus ou moins religieuses qui ne sont pas nettement catholiques, ébranlent la foi dans les âmes. D’autre part, l’habitude du vice engendre les révoltes de la volonté contre tout ce qui s’oppose aux passions. Enfin la négligence de la pratique religieuse enlève au cœur le sentiment de bonheur que donne la possession de la foi et affaiblit en nous cette vie de la grâce, sans laquelle la foi n’est plus en sûreté dans nos cœurs.
La foi chrétienne renferme bien des articles qui dépassent notre entendement, mais en aucun point il ne peut exister de véritable contradiction entre elle et la raison : « Non seulement, dit le Concile du Vatican, la foi et la raison ne peuvent jamais se combattre, mais elles se prêtent un mutuel secours, puisque la droite raison démontre les fondements de la foi et, qu’éclairée par sa lumière, elle cultive la science des choses divines. Quant à la foi, elle délivre et préserve la raison des erreurs et lui fournit d’amples connaissances. Tant s’en faut donc que l’Église s’oppose à la culture des arts et des sciences ; au contraire, elle aide cette culture et la fait progresser de mille manières. Ni elle n’ignore en effet, ni elle ne méprise les avantages que peuvent apporter aux hommes les sciences et les arts ; bien plus, elle a voulu que, de même que ces grandes choses viennent de Dieu, qui est le Seigneur des sciences, de même elles doivent ramener à Dieu avec le secours de la grâce. »
§13. LA FOI.
RÉSUMÉ
Tel est donc l’ordre et l’harmonie de la vérité :
Tout être raisonnable qui réfléchit et cherche le vrai, trouve Dieu.
Quand il l’a trouvé, s’il est droit et s’il ne préfère pas les ténèbres à la lumière, il étudie Jésus-Christ.
Connaissant Jésus-Christ, il se soumet à lui et confesse sa divinité.
Ayant confessé sa divinité, il écoute avec docilité et respect l’Église que le Christ a établie et que la sainte Ecriture appelle : la colonne et le soutien de la vérité 1.
Comme la poule rassemble ses poussins sous ses ailes, comme la mère prodigue à ses enfants ses soins et son amour, ainsi l’Église catholique unit, console, fortifie, instruit les fidèles au nom de son divin Fondateur et les conduit à une vie supérieure à celle de la terre. Elle prend entre ses bras les pauvres et les faibles pour les cacher dans le cœur de Jésus-Christ, se fait médiatrice entre mon Dieu et moi pour m’aider à monter jusqu’à lui et à m’unir à lui.
Je confesse la sainte foi une, catholique, apostolique et romaine, la foi de mes pères, la foi que les saints de tous les temps et de tous les pays ont confessée. Je crois qu’en dehors d’elle il n’y a point de salut. Je veux vivre et mourir dans son sein, parce qu’elle est seule en possession de la vérité. Je proteste que je veux persévérer dans une obéissance fidèle envers son chef visible notre saint Père le Pape, envers les Evêques qui lui sont unis comme les membres le sont à leur chef, et envers tous les supérieurs ecclésiastiques que les Evêques ont établis sur les fidèles. Je condamne tout ce que la sainte Église condamne ; je souscris de tout mon cœur à tout ce qu’elle approuve. Jamais, en quelque circonstance que ce soit, je ne donnerai mon assentiment formel ou tacite, écrit ou verbal, à rien de ce qui pourrait se trouver en opposition avec la doctrine enseignée par l’Église catholique romaine. C’est ici ma profession de foi, ma détermination arrêtée, et je la prononce avec la même sincérité, la même fermeté que si je touchais à mes derniers moments. Pour demeurer toujours inébranlable dans ces sentiments, je prie Dieu de m’accorder son assistance et sa bénédiction, par Jésus-Christ Notre-Seigneur ! Ainsi soit-il.
PROTESTATION DE FIDÉLITÉ A L’ÉGLISE.