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LE CULTE DE LA LIBERTÉ

Par M. l'abbé Donald J. Sanborn (Sodalitium n°45)

 

La liberté est un dogme du monde moderne. On la porte aux nues, on la met au rang des grands biens à chérir en cette vie, un bien pour lequel il vaut la peine de mourir. C’est pour la sauvegarde de la liberté qu’eut lieu la Guerre de l’Indépendance américaine. C’est pour la liberté qu’eut lieu la Deuxième Guerre Mondiale, et c’est par les “Liberty Bonds” qu’elle fut partiellement financée. Longtemps notre monnaie a porté l’effigie d’une femme personnifiant la liberté, et qui portait même sur la tête une couronne où était inscrit le mot liberté. Cette “Miss Liberty” portait aussi bien un “bonnet phrygien” qui figure également sur l’emblème de nombreux états, ceux de New York et du New Jersey entre autres. Au milieu du port de New York se dresse la colossale Statue de la Liberté, une torche à la main, initialement dénommée “La Liberté éclairant le Monde”. Le drapeau américain avec ses raies rouges et blanches dérive du drapeau des “Fils de la Liberté”. Patrick Henry disait : “Donnez-moi la liberté ou la mort”.

 

C’est Thomas Jefferson qui consacra la liberté dans la Déclaration d’Indépendance en la mettant au nombre des droits inaliénables : vie, liberté, et poursuite du bonheur. Cette Déclaration des Droits exalte liberté de religion, liberté d’expression, liberté de la presse en tant que grands biens à préserver. Sur une suggestion de Franklin D. Roosevelt, Norman Rockwell réalisa un tableau qui en représente les quatre points essentiels : l’affranchissement de la misère, l’affranchissement de la crainte, la liberté de culte, la liberté d’expression. Enfin c’est la “Cloche de la Liberté”, devenue relique nationale et lieu de pèlerinage, qui sonna la Déclaration d’Indépendance.

 

L’attachement à la liberté représente une grande partie, sinon l’essence, de la culture américaine, mais ne se cantonne pas pour autant en Amérique. La France continue à graver sur sa monnaie le mot liberté avec ceux d’égalité et de fraternité. Presque toutes les démocraties européennes sacralisent d’une façon ou d’une autre le concept de liberté.

 

Toute culture devant faire l’objet d’un examen minutieux de la part de la Foi catholique, il est nécessaire d’examiner un peu ce culte de la liberté qui fait partie intégrante de la culture américaine et de la culture occidentale depuis le XVIIIème siècle.

 

La notion catholique de liberté

Ce qui, à première vue, paraît un peu étrange dans le culte de la liberté est qu’il n’existait pas avant le XVIIIème siècle. Nulle part dans la grande culture catholique de l’Europe médiévale on ne trouve un culte de la liberté. Pourquoi, tout à coup, dans l’Europe du XVIIIème, trouve-t-on ce culte poussé au point de “diviniser” le concept par l’intermédiaire de la représentation d’une femme glorifiée ?

 

Tout catholique un peu versé en histoire devrait y voir là comme un signal d’alarme. Le dix-huitième siècle est en effet le siècle de la Révolution, de la Franc-Maçonnerie, du naturalisme et du rationalisme. C’est le siècle de la guillotine. C’est le siècle du Jansénisme qui, outre le fait d’être, dans le domaine religieux, une forme du Protestantisme, exerça également une influence politique puissante aux côtés du libéralisme. En bref, le dix-huitième siècle est le siècle du ferment intellectuel contre l’autorité légitime de l’Église et un siècle de gouvernement de l’État.

 

Ce culte de la liberté nouveau genre laissait entendre que l’Église catholique et la culture catholique jusqu’au XVIIIème siècle avaient en quelque sorte loupé le coche en ce qui concerne la liberté. C’est comme si quelque chose manquait à la vie, comme s’il y avait des contraintes dans la vie catholique dont il fallait se débarrasser. Autrement dit, de quoi les adorateurs du culte de la liberté du XVIIIème siècle cherchaient-ils à se libérer ?

 

Cependant l’Église catholique n’a rien négligé en matière de liberté. Toujours pour la défense du libre arbitre, en particulier à l’encontre des protestants, l’Église catholique n’a manqué en aucune façon de traiter le problème de la liberté de la volonté humaine dans les écrits de ses grands esprits. Elle a toujours enseigné que l’homme est doté de libre arbitre et qu’il est par conséquent responsable de ses actions. A cause de son libre arbitre, il est capable de mérite, et donc capable, avec l’aide de la grâce divine, de parvenir au salut éternel. Par conséquent il est aussi capable de démérite, et capable de se damner par sa propre faute pour toute l’éternité.

 

La philosophie catholique enseigne que la volonté humaine est une faculté aveugle qui doit être informée par l’intellect sur ce qui est bien et ce qui est mal. L’intelligence est cette faculté de l’âme par laquelle elle appréhende la réalité. L’intellect informe et commande la volonté en fonction des objets qu’elle doit poursuivre.

 

En outre la philosophie catholique enseigne que le fondement de la liberté de la volonté est l’indifférence à l’égard de l’objet. Cela signifie simplement que les biens créés, à la différence de Dieu, n’ont pas un pouvoir d’attraction nécessaire sur l’âme, comme un aimant sur le métal, mais simplement un pouvoir d’attraction limité, tel qu’il peut être refusé par l’intellect, et donc par la volonté.

 

Prenons un exemple. Lorsque vous posez de la nourriture devant un chat affamé, le chat s’approche nécessairement de la nourriture, sans aucune liberté ni délibération, car il perçoit seulement le bien sensuel de la nourriture. Le chat est attiré par la nourriture comme le métal par l’aimant. Le chat n’est pas libre de cet acte. Par ailleurs, si vous posez une assiette de nourriture devant un homme affamé, si fortement attiré qu’il soit de par sa nature sensuelle, il demeure capable de percevoir avec son intelligence le fait que la nourriture est seulement un bien limité. Il est capable de discerner en quoi cette nourriture est bonne et en quoi elle est mauvaise. Par exemple, il pourrait percevoir qu’elle est nourrissante, et dans le même temps qu’elle a mauvais goût. Il doit alors prendre une décision délibérée, une décision libre : ou bien il supporte le mal que représente le mauvais goût et mange l’aliment parce qu’il est nourrissant ; ou bien c’est le mal que représente le mauvais goût qui l’emporte et il rejette l’aliment nourrissant. C’est ainsi que, même affamé, il a la possibilité de refuser librement de manger.

 

L’homme est donc libre en face des biens créés limités ; la raison en est que son intelligence est faite pour connaître l’être universel, et sa volonté faite pour aimer le bien universel. Lorsqu’il manque quelque chose au bien pour être universellement bon, qu’il est seulement un bien limité, la volonté demeure libre, c’est-à-dire non contrainte, devant cet objet. La volonté peut librement refuser un bien qui l’attire d’une façon limitée. Les martyrs ont par exemple librement renoncé au bien de préserver leur vie naturelle pour posséder un bien plus grand, Dieu. Aucun animal ne peut faire une telle chose, car aucun animal ne peut comprendre le bien merveilleux qu’est le fait de posséder Dieu. En fait, seule la vision de Dieu qui est Être Subsistant et Bien Subsistant, est capable d’attirer nécessairement l’attention de l’intelligence humaine et l’adhésion de sa volonté.

 

Si nous passons maintenant à la liberté dans les domaines social et politique, il est évident que les êtres humains devraient être libres dans les sphères qui sont réellement indifférentes, mais contraints en ce qui concerne les choses nécessaires. Ainsi, l’observance de la loi de Dieu et de la loi naturelle se rattachant nécessairement au bien commun, il est du devoir des gouvernements civils de proscrire les transgressions de ces lois. Les hommes ne devraient pas être “libres” de désobéir à la loi de Dieu et à la loi naturelle. Ainsi le meurtre qui est contre ces deux lois, est proscrit par la loi civile. D’autre part, les gouvernements civils outrepassent les limites de leur autorité lorsqu’ils tentent de dicter aux citoyens des pratiques qui ne sont pas nécessairement liées au bien commun, comme de décider si les gens doivent boire ou non des boissons alcooliques, s’ils doivent porter ou non la ceinture de sécurité en voiture.

 

Est-ce là la liberté à laquelle tend le culte de la liberté ? Le culte de la liberté consiste-t-il dans le désir de libérer l’homme des excès du gouvernement en matière de réglementation de la vie des citoyens ?

 

Non, les faits de l’histoire nous disent tout autre chose. Le monde n’a jamais connu de gouvernements plus oppresseurs ni d’administrations aussi énormes que celles qui professent le culte de la liberté. Aucun gouvernement ne s’est jamais autant immiscé dans la vie des citoyens. Depuis l’abolition des monarchies et l’instauration des démocraties, l’individu moyen, la famille et le travail ont fait l’objet d’une oppression tyrannique, de taxations qui l’épuisent, aussi bien que de “manœuvres” économiques et sociales qui affectent tous les aspects de la vie. Comparés aux démocraties des deux derniers siècles, les régimes monarchiques les plus dictatoriaux semblent des fêtes de la liberté. Avec la démocratie est apparu le tandem du libéralisme et du socialisme, deux sources d’oppression pour des centaines de millions de gens, pour ne pas dire de milliards, tout au long des deux derniers siècles.

 

Voilà qui nous montre que la liberté recherchée par le culte de la liberté n’est pas la liberté de l’individu moyen vis-à-vis des énormes administrations oppressives et tyranniques. C’est une liberté vis-à-vis de tout autre chose.

 

La Franc-maçonnerie

Au XVIIIème siècle, le culte de la liberté est intimement lié à la Franc-maçonnerie. L’objectif politique et social de la Franc-maçonnerie était et est encore de “libérer” l’homme de la “tyrannie” de l’Église catholique et de toute autorité civile non démocratique. Par définition pour le franc-maçon une église ou un régime est tyrannique s’il cherche à instaurer des dogmes ou bien à commander sans le consentement des gouvernés. Aussi les franc-maçons ont-ils toujours détesté l’Église catholique romaine, puisqu’elle prétend tenir du ciel son pouvoir d’enseigner des doctrines surnaturelles et d’instaurer des lois contraignantes auxquelles l’humanité entière doit adhérer. Les franc-maçons se sont opposés de même à toute monarchie qui ne s’est pas d’elle-même démise du pouvoir (comme l’a fait l’actuelle monarchie anglaise, dont l’impuissance est absurde). C’est pourquoi toutes les monarchies qui refusèrent d’accéder à leur exigence de démocratie socialiste, où le pouvoir est considéré comme venant du peuple et non de Dieu, eurent affaire à la réprobation solennelle de la Franc-maçonnerie. Les francs-maçons commencèrent par l’exécution de Louis XVI en 1793, pour ne plus cesser d’œuvrer contre les monarchies d’Europe et d’ailleurs qui ne se conformaient pas à leurs principes. L’une après l’autre, ces monarchies s’écroulèrent au cours du XIXème siècle et jusqu’à la fin de la Première Guerre Mondiale qui vit, pour terminer, la chute de l’empereur d’Autriche, du tzar de Russie et du kaiser d’Allemagne en tant que chefs d’États cédant la place, comme toujours, aux démocraties libérales socialistes, avec une curieuse prépondérance des Juifs au gouvernement.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La Statue de la Liberté - Une déesse toute maçonnique

 

 

 

“Libérer” le monde de la “domination du tzar” et de la “domination du kaiser”, voilà quel était, à en croire du moins la propagande des alliés de l’époque, le motif de la Première Guerre Mondiale. Wilson disait que la raison pour laquelle nous devions entrer en guerre contre l’Allemagne était de “sauver le monde au profit de la démocratie”.

 

Il ne faudrait pas cependant déduire de ces commentaires que les régimes monarchiques de l’Europe du XIXème et du début du XXème étaient absolument parfaits. L’empereur d’Autriche, le tzar et le kaiser avaient causé de grosses difficultés à l’Église, mais sûrement pas plus de difficultés que les démocraties socialistes de France et d’Angleterre. L’Italie avait elle aussi persécuté l’Église, et bien que demeurée monarchie comme l’Angleterre, elle était virtuellement démocratique, son monarque étant entre les mains des francs-maçons et autres sociétés secrètes anti-catholiques du même genre. Il est simplement à remarquer que tout pouvoir, ecclésiastique ou civil, prétendant détenir son autorité de Dieu, et ne dépendant pas d’une façon ou d’une autre du peuple, a droit à la haine de la Franc-maçonnerie. La Franc-maçonnerie cherche à “libérer” le peuple sur les plans politique et social de “liens” de ce type, de façon à ce qu’il puisse “jouir” de la “liberté” d’un régime démocratique.

 

Cette haine de la Franc-maçonnerie pour la papauté et pour la monarchie apparaît bien évidente dans les rites d’initiation des chevaliers Kadosh du 30ème degré, au cours desquels il est enjoint au chevalier de passer l’épée au travers de deux crânes coiffés l’un de la tiare, l’autre de la couronne. Le symbolisme de ce geste ne requiert aucun commentaire.

 

Le culte de la liberté a toujours été l’un des thèmes favoris de la Franc-maçonnerie. La liberté qu’ils recherchent n’est pas la liberté légitime et due vis-à-vis des contraintes écrasantes des administrations socialistes, liberté qu’un citoyen est parfaitement en droit de désirer, mais plutôt la liberté vis-à-vis de l’autorité de Dieu, la “liberté” du diable, la liberté de perdition, comme l’appelle saint Augustin. Ils ne désirent pas la liberté des enfants de Dieu, mais la “liberté” qui nous rend esclaves du péché.

La Statue de la Liberté est l’une des nombreuses preuves de l’existence du culte de la liberté et aussi de l’influence profonde qu’il exerce sur notre culture et sur notre mentalité. Ce colosse dressé en plein port de New York fut conçu par les francs-maçons et sa mise en place, par les francs-maçons, fit l’objet d’une cérémonie franc-maçonne.

 

C’est Frédéric-Auguste Bartholdi, franc-maçon, qui en fut l’auteur. Il avait déjà réalisé pour la ville de New York une statue du marquis de Lafayette, autre franc-maçon, à l’occasion du centenaire de la signature de la Déclaration d’Indépendance.

 

A l’incitation de congénères francs-maçons et autres esprits similaires en France, il fit voile pour l’Amérique avec l’idée de proposer le projet. D’après son biographe, un maçon encore, il n’avait aucun plan lorsqu’il prit la mer, mais à l’entrée du port de New York “il eut la vision d’une magnifique déesse brandissant une torche qui accueillerait tous les visiteurs du pays de la liberté et de l’opportunité”.

 

Rentré en France et grâce à une puissante propagande maçonnique, il réussit à rassembler la somme de 3.500.000 francs français, très grosse somme pour l’époque car on est en 1870. Pour le visage de sa “Déesse de la Liberté” il choisit sa propre mère comme modèle. C’est le franc-maçon Gustave Eiffel, rendu fameux par l’édification de la tour de 300 mètres portant son nom, qui pourvut à la charpente.

 

Bien que le support financier ait été mis à disposition par la France, l’Amérique ne voulait pas fournir l’argent pour le piédestal. Et c’est Joseph Pulitzer, propriétaire et directeur du New York World, qui s’arrangea pour trouver la somme de 100.000 dollars pour le projet.

 

En 1877, jour de l’anniversaire de Washington, le Congrès acceptait la statue en tant que don du peuple français. Pour l’ériger, c’est l’Île de Bedloe, aujourd’hui Île de la Liberté, qui fut choisie par le général Sherman, l’incendiaire bien connu d’Atlanta. Entre-temps, à Paris, le travail progressait. Levi P. Morton, alors ambassadeur en France, posait le premier rivet. Le 21 mai 1884, la statue était achevée et le 4 juillet de la même année elle était présentée à l’ambassadeur Levi Morton par Ferdinand de Lesseps, le constructeur du Canal de Suez.

 

Côté américain, le président du Comité mandaté à recevoir la statue contactait la Grande Loge de la Maçonnerie Libre et Acceptée de l’État de New York. Depuis la pose de la première pierre du Capitole en 1793 par le franc-maçon George Washington en personne, avec l’assistance de la Grande Loge de Maryland, il est de tradition, en Amérique, que la première pierre des bâtiments publiques et privés d’une certaine importance soit “consacrée” selon tous les rites maçonniques. C’est également une cérémonie maçonnique qui a marqué la pose de la première pierre du Monument de Washington.

 

La cérémonie pour la pose de cette première pierre fut fixée au 5 août 1884. Il tombait des cordes. Le vaisseau Bay Ridge, tout décoré, transporta à l’Île de Bedloe une centaine de francs-maçons accompagnés de quelques officiels. Le Franc-maçon Richard M. Hunt, architecte principal du piédestal, tendit les outils aux officiers maçons.

 

Le franc-maçon Edward M. L. Ehlers, Grand Secrétaire et membre de la Loge Continentale 287, lut alors la liste des documents qui devaient être déposés dans le coffret en cuivre inséré dans la pierre, c’est-à- dire : une copie de la Constitution des États-Unis ; le discours d’adieu de George Washington ; vingt médailles de bronze des divers présidents ayant précédé Chester A. Arthur (Washington, Monroe, Jackson, Polk, Buchanan, Johnson et Garfield inclus, tous francs-maçons) ; des copies du journal New York City ; un portrait de Bartholdi ; une copie du Poème sur la Liberté de E. R. Johnes ; enfin une liste sur parchemin des officiers de la Grande Loge.

 

On procéda à la cérémonie maçonnique traditionnelle. Après qu’on eût vérifié si la pierre était bien carrée, lisse et d’aplomb, le Grand Maître appliqua le mortier et la pierre fut mise en place. Il la frappa alors par trois fois et la pierre fut déclarée dûment posée. Les éléments de la “consécration”, maïs, vin, huile, furent alors présentés.

 

Puis le “Très Honorable” Grand Maître dit quelques mots : “Pourquoi faire appel à la Fraternité maçonnique pour poser la première pierre d’un édifice comme celui qui vient d’être érigé ?” Question à laquelle il donna lui-même cette réponse : “Aucune institution n’a jamais fait autant pour promouvoir la liberté et libérer l’homme des entraves et des chaînes de l’ignorance et de la tyrannie que la Franc-Maçonnerie”.

 

Mais l’allocution principale fut faite par le Grand Maître Député :

 

“Toute énorme que soit cette statue, ses proportions physiques ne sont rien à côté de la noblesse de ce qu’elle représente. La liberté éclairant le monde ! Quelle pensée grandiose ! Être libre est la première, la plus noble aspiration du cœur humain. Et c’est dorénavant une vérité universellement reconnue : les hommes ne deviennent civilisés, éclairés et utiles que dans la mesure où ils possèdent la liberté”.

 

La statue arriva en juin 1885, en pièces détachées. Elle fut inaugurée officiellement le 28 octobre 1886. Le Président Grover Cleverland (franc-maçon) présidait la cérémonie et c’est le franc-maçon Henry Potter, Évêque de New York qui fit la dédicace. Le franc-maçon Bartholdi retira le drapeau tricolore français qui recouvrait le visage de la statue. Et c’est le franc-maçon Chauncey M. Depew, Sénateur des États- Unis, qui prononça le principal discours.

 

Le bonnet phrygien

Que la notion de liberté – affranchissement par rapport aux lois de Dieu, de l’Église, et du gouvernement civil légitime - ait profondément influencé notre culture, il en existe un autre signe. C’est la représentation du “bonnet phrygien” sur de nombreux sceaux officiels américains, ainsi que sur des gravures du XVIIIème siècle reproduisant des scènes de la Révolution Américaine.

 

Le bonnet phrygien est un bonnet mou, peu profond, quelque chose qui ressemble au bonnet de laine du skieur. Son origine est très ancienne et remonte à l’époque où l’on faisait porter cette espèce de chapeau aux esclaves affranchis en signe d’émancipation. D’où le symbolisme : celui qui le porte est affranchi d’une sorte d’esclavage. Mais de quel esclavage s’agit-il ?

 

Au XVIIIème siècle, ce bonnet était porté par les radicaux qui penchaient résolument pour la destruction des monarchies en faveur des régimes républicains ou démocratiques, en accord avec les préceptes des philosophes libres-penseurs et athées de ce même siècle. Les révolutionnaires français coiffés du bonnet phrygien mènent leurs victimes à la guillotine. C’était un symbole de révolte contre l’ordre établi, un appel à un ordre nouveau, un ordre radical dans lequel le pouvoir viendrait du peuple et non de Dieu. On peut trouver un équivalent moderne dans la faucille et le marteau ou dans le symbole de la paix des années 1960.

 

En général ou bien ce bonnet coiffe le chef de la Déesse de la Liberté (bien que la Déesse de New York ne le porte pas), ou, plus souvent, il est enfilé au bout d’une pique. C’est sous cette dernière forme que ce symbole du radicalisme du XVIIIème siècle apparaît sur un grand nombre de sceaux des États-Unis : sceaux des États de New York, de New Jersey, de la Caroline du Nord, de l’Idaho, de Hawaï, de l’Iowa, du Colorado, de la Virginie de l’Ouest, de l’Arkansas, et de la Virginie sans oublier les sceaux du Sénat et de l’Armée des États-Unis. On le trouve également sur la tête de la Déesse de la Liberté représentée sur le Dollar Morgan (dollar d’argent en circulation durant la dernière partie du XIXème siècle) de même que sur la Déesse de la Liberté “en marche” [c’est ainsi qu’elle est représentée] figurant sur le demi-dollar du milieu du XXème, ainsi que sur le dime Mercury [pièce de dix cents] de la même période. (Mercure est, soit dit en passant, l’un des dieux favoris de la ménagerie des divinités maçonniques).

 

Pendant la Révolution française, en devenant la coiffure en vogue de tout partisan favorable à la Révolution, puis celle des Jacobins cruels et sanguinaires, chefs du Règne de la Terreur, le Bonnet phrygien fut confirmé comme symbole du radicalisme.

 

Le bonnet phrygien occupe une grande place dans le symbolisme maçonnique, cela va sans dire. La fameuse “Marianne”, symbole féminin de la République révolutionnaire française, porte évidemment le bonnet. En 1884, le gouvernement français, bourré de francs-maçons, fit faire des bustes de cette femme diabolique arborant sur les épaules et sans vergogne une écharpe maçonnique portant les trois dates glorieuses pour la fraternité malfaisante : 1789, date de la Révolution française, 1848 et 1870, dates des révolutions subséquentes dans lesquelles les francs-maçons et leurs principes lucifériens prirent le pouvoir en cette France autrefois catholique. Comme d’habitude Marianne était coiffée du bonnet en question.

 

Le Grand Sceau

Le Grand Sceau des États-Unis regorge de symbolisme maçonnique. Il figure au dos du billet d’un dollar. Les hommes chargés par le Congrès Continental de réaliser ce sceau des États-Unis étaient tous francs-maçons : Thomas Jefferson, John Adams, ainsi que Benjamin Franklin (débauché sans pudeur et goujat par dessus le marché), qui en était le président. Un certain nombre de modèles se succédèrent avant que soit adopté le sceau actuel qui date de 1782. C’est Jefferson lui-même qui ajouta le triangle autour de l’œil en 1776, ainsi que l’inscription E Pluribus Unum.

 

Pour décrire fidèlement le symbolisme maçon et occulte contenu dans le Grand Sceau, il faudrait écrire un article à part. Mon but ici en parlant de la présence des symboles maçonniques sur le Grand Sceau, est seulement de donner d’autres preuves de la profonde influence qu’a eue la Maçonnerie sur la culture américaine.

 

Pour celui qui douterait du caractère maçonnique de ces symboles, je me contenterai de citer le magazine officiel de la Maçonnerie dans sa publication d’avril 1960, curieusement intitulée New Age :

 

Symboles maçonniques figurant sur le billet d’un dollar

13 feuilles sur la branche d’olivier

13 barres et rayures dans l’écusson

13 plumes dans la queue

13 flèches

13 lettres dans le “E Pluribus Unum” sur le ruban

13 étoiles au-dessus, à l’intérieur du blason vert

32 longues plumes représentant le 32ème degré de la Maçonnerie

13 pierres de granit dans la Pyramide ornée de l’“Œil” maçonnique

13 lettres dans Annuit Coeptis, “Dieu a approuvé”.

Sur l’autre face du billet est représenté le sceau du Ministère du Trésor des États-Unis comportant une clé, une équerre, la Balance de la Justice, ainsi qu’un compas, symbole évidemment important de la Maçonnerie.

James B. Walker 32°

 

Même le drapeau

Old Glory [le drapeau américain] n’a pas échappé lui non plus, je crains bien, à l’influence des principes maçonniques de libération de l’asservissement à Dieu. L’origine des étoiles et des rayures demeure obscure, mais nous savons que les Hollandais protestants sont les premiers à avoir employé les rayures rouges et blanches horizontales lors de leur rébellion contre l’Espagne catholique. Ces rayures refont surface arborées par les vaisseaux anglais venus au secours des Huguenots français en lutte contre leurs compatriotes catholiques. Elles réapparaissent ensuite sur le drapeau des Fils de la Liberté, groupe maçonnique qui organisa la ‘Tea-Party’ de Boston.

 

Le drapeau a donc lui aussi une part historique dans cette culture libérant de l’“asservissement” à l’Église catholique, et en définitive de tout gouvernement civil non démocratique, c’est-à-dire de tout gouvernement qui ne se contente pas d’être un instrument de la volonté du peuple.

 

Le problème du catholique américain et de son attachement à des idéaux condamnés par l’Église

Si j’ai cité ces exemples de l’influence de la Maçonnerie dans nos institutions, c’est pour faire remarquer au catholique américain que des principes étrangers à la Foi catholique ont profondément pénétré la culture dans laquelle nous vivons. Aux États-Unis, c’est un problème avec lequel l’Église catholique doit se débattre et qui lui occasionne de grosses difficultés. Au XIXème siècle le clergé se partageait en deux camps, les libéraux et les anti-libéraux (nous employons ces termes faute de mieux). Les libéraux ne voyaient pas le problème que posait le fait d’incorporer dans le catholicisme les principes du culte américain de la liberté ; les anti-libéraux voyaient bien le problème et dénonçaient ces principes qui affaiblissaient la Foi catholique. Pour finir, ce sont les libéraux qui prévalurent, en particulier avec l’émergence d’une personnalité comme le Cardinal Gibbons de Baltimore. Le camp libéral comptait aussi d’importants personnages comme le Cardinal Farley de New York et l’Archevêque Ireland de Saint Paul.

 

Il ne faut pas prendre le mot “libéral” au sens où on l’entend de nos jours. En cette fin de siècle, à l’époque où vivaient ces hommes, être libéral signifiait être convaincu que les principes animant les hommes politiques et la mentalité américaine en général sont compatibles avec le catholicisme. Ces libéraux considéraient en fait le système américain de l’indifférence du gouvernement vis-à-vis de toutes les religions comme un idéal à suivre pour toutes les nations. Dans un tel système - disaient-ils - l’Église peut et doit s’épanouir, car elle n’a pas pour la contrer la résistance d’un gouvernement hostile. Voilà qui sonnait bien aux oreilles de ce côté de l’Atlantique. Depuis un siècle leur parvenaient d’Europe d’horribles histoires de gouvernements civils persécutant l’Église catholique. Le système américain du “pas touche aux religions” semblait un peu meilleur.

 

S’il est vrai que l’Église catholique s’est effectivement épanouie dans ces pays dont le gouvernement professait cette soi-disant indifférence vis-à-vis des religions, il faut reconnaître que cette “liberté d’essor” lui a coûté cher. Le prix en fut l’oubli de la doctrine de l’Église sur l’union de l’Église et de l’État, l’oubli du devoir du gouvernement de professer la seule et unique foi, et l’absence totale de répression des religions non-catholiques. On disait aux catholiques que le système américain de liberté de religion était le système idéal, et les catholiques portaient bien ancrée dans leur tête l’idée que vous avez le droit civilement d’être protestant, juif, musulman ou même sataniste, puisque la religion n’a rien à voir avec l’état, et réciproquement.

 

Mais cette opinion fut condamnée par le Pape Grégoire XVI et par le Pape Pie IX :

 

De cette source empoisonnée de l’indifférentisme, découle cette maxime fausse et absurde ou plutôt ce délire qu’on doit procurer et garantir à chacun la liberté de conscience.

Grégoire XVI - Mirari vos.

 

Et de fait, Vous le savez parfaitement, Vénérables Frères, il s’en trouve beaucoup aujourd’hui pour appliquer à la société civile le principe impie et absurde du “naturalisme”, comme ils l’appellent, et pour oser enseigner que “le meilleur régime politique et le progrès de la vie civile exigent absolument que la société humaine soit constituée et gouvernée sans plus tenir compte de la Religion que si elle n’existait pas, ou du moins sans faire aucune différence entre la vraie et les fausses religions”.

Pie IX - Quanta cura.

 

Et contre la doctrine de la Sainte Écriture, de l’Église et des Saints Pères ils affirment sans hésitation que : “la meilleure condition de la société est celle où on ne reconnaît pas au pouvoir le devoir de réprimer par des peines légales les violations de la loi catholique, si ce n’est dans la mesure où la tranquillité publique le demande”.

Pie IX - Quanta cura.

 

En conséquence de cette idée absolument fausse du gouvernement social, ils (les tenants du naturalisme) n’hésitent pas à favoriser cette opinion erronée, on ne peut plus fatale à l’Église catholique et au salut des âmes, et que notre prédécesseur d’heureuse mémoire, Grégoire XVI, appelait un délire, savoir que “la liberté de conscience et des cultes est un droit propre à chaque homme ; qu’il doit être proclamé et assuré dans tout État bien constitué ; et que les citoyens ont droit à la pleine liberté de manifester hautement et publiquement leurs opinions, quelles qu’elles soient, par la parole, par l’impression ou autrement, sans que l’autorité ecclésiastique ou civile puisse le limiter”.

Pie IX - Quanta cura.

 

De ces textes il ressort clairement que l’Église catholique condamne la liberté de conscience, la liberté de religion, la liberté d’expression et la liberté de la presse. Pourtant ces “libertés” sont considérées comme sacro-saintes dans la culture américaine. Dans ses efforts pour ne pas paraître non-américain, le clergé catholique des États-Unis dans son ensemble a négligé ces condamnations, de même qu’il a négligé l’enseignement de l’Écriture sainte, et celui de l’Église et des Pères de l’Église qui en sont le support.

 

C’est en vain que l’on cherche dans les catéchismes catholiques d’avant Vatican II, même au niveau des lycées, l’enseignement de l’Église sur les devoirs des états envers la religion catholique. La plupart des catéchismes catholiques et des manuels d’histoire pré-Vatican II ou bien gardent un silence complet sur le sujet, ou bien exaltent le système américain de l’indifférence à toutes les religions, de la liberté de conscience, de la liberté de religion, de la liberté d’expression et de la liberté de la presse.

 

Pourquoi cela ? Pourquoi ces enseignements et ces condamnations étaient-ils volontairement ignorés par le clergé catholique de ce pays, au point qu’à l’issue de douze ou seize années passées dans les écoles catholiques, les étudiants n’en connaissaient rien ? La réponse est que les catholiques du XIXème siècle et du début du XXème ressentaient un besoin urgent de convaincre l’‘establishment’ protestant de ce pays que les catholiques étaient de bons américains, et qu’ils n’avaient aucun problème à accepter la mentalité et la culture américaine. Les immigrants irlandais, allemands et italiens, pour la plupart catholiques, étaient extrêmement désireux d’assurer à l’Église paix et prospérité dans un pays peuplé par des gens qui, en grande part, avaient fui l’Europe pour échapper à l’influence catholique. Et puisque le culte de la liberté, l’attachement à la liberté de religion, à la liberté d’expression, à la liberté de la presse, et à la liberté de conscience était d’une importance suprême dans la culture protestante et maçonnique préexistant en Amérique, les catholiques considéraient comme une nécessité de marier en quelque sorte leur catholicisme au culte de la liberté. La conséquence en fut le délaissement, par un silence quasiment total, d’enseignements très importants de la morale de l’Église catholique romaine. De plus cela nécessitait d’épurer, de tirailler, d’élargir, bref d’accommoder les faits historiques et les événements des XVIIIème et XIXème siècles pour leur donner une apparence de compatibilité avec les principes catholiques.

 

L’Archevêque Ireland, figure en vue à ce tournant de siècle, fut la personnification de toute cette mentalité. Il était tellement imbu de ces idées que, dans un discours intitulé “Catholicisme et Américanisme” prononcé à Milwaukee en 1913, il fut capable de faire les déclarations suivantes :

 

La liberté religieuse est nécessairement la vie de base de l’Amérique, le ciment parcourant tous ses murs, la sauvegarde de sa paix et de sa prospérité. Violez la liberté religieuse contre les catholiques : nos épées sont aussitôt dégainées. Violez-la en faveur des catholiques, contre les non-catholiques : elles sont tout aussitôt prêtes à jaillir de leur fourreau.

 

Si j’avais été dans l’auditoire, j’aurais demandé : “Votre Excellence, lorsque dans soixante ou soixante-dix ans, au nom de la liberté de religion, les ennemis de l’Église feront des films faisant de Notre-Dame une courtisane et de Notre-Seigneur un fornicateur, les catholiques dégaineront-ils pour protéger le droit qu’ont ces blasphémateurs de faire de tels films ?” Qu’aurait répondu l’Archevêque à cette question ? On frémit rien que d’y penser. Plus loin il affirme :

 

La conscience individuelle est le dernier asile de l’âme en présence de l’autorité civile ou ecclésiastique. L’américanisme et le catholicisme s’inclinent tous deux devant la prédominance de la conscience individuelle.

 

S’incline devant la prédominance de la conscience individuelle ? “Votre Excellence, lorsque dans soixante ou soixante-dix ans, au nom de la liberté de conscience, les femmes tueront leur bébé dans leur ventre, l’autorité civile ou ecclésiastique s’inclinera-t-elle devant la prédominance de la conscience individuelle ?” Qu’un évêque catholique, vivant en 1913, ait pu proférer de telles paroles, voilà qui est incroyable. Quel est l’objet de l’Église catholique si elle doit s’incliner devant la prédominance de la conscience individuelle ? L’origine d’une telle idée est complètement protestante et maçonnique. C’est à ce principe, que la conscience individuelle est au-dessus de l’autorité de l’Église, que Luther fit appel dans son hérésie et dans sa révolte contre l’Église catholique.

 

Ailleurs, le même archevêque déclare :

 

Si nous le pouvions, changerions-nous quelque chose à la Constitution en sa partie qui traite de la religion, changerions-nous les principes de l’Américanisme en ce qui regarde la liberté de religion ? Je réponds catégoriquement Non.

 

Non ? “Votre Excellence, en tant que catholiques, n’avons-nous pas le devoir de désirer la reconnaissance publique et légale de l’Église catholique romaine comme la seule vraie Église du Christ ?” A cette question, il répond :

 

Cependant, avons-nous jamais demandé des privilèges spéciaux non accordés aux autres citoyens d’Amérique ? Non - jamais - pas plus que nous ne consentirions aux autres des privilèges spéciaux qui ne nous seraient pas accordés à nous - je dirais même que nous le demanderions encore moins pour nous que pour les autres. Si les membres d’une église, ou d’une organisation religieuse ou semi-religieuse quelconque, viennent à réclamer des privilèges spéciaux, que la honte du non-américanisme soit leur partage. Ce genre de contestation ne fera jamais la disgrâce du catholicisme.

 

La disgrâce du catholicisme ? Demander pour Notre-Seigneur Jésus-Christ notre Roi et pour Son Église la reconnaissance légale qui leur est due, est-ce là la disgrâce du catholicisme ? Mgr Ireland, c’est plutôt vous qui êtes la disgrâce du catholicisme.

 

Il est impossible de réconcilier ces déclarations avec les condamnations du Pape Pie IX que j’ai citées plus haut. Il condamnait de son autorité apostolique la proposition selon laquelle le meilleur régime politique et le progrès de la vie civile exigent absolument que la société humaine soit constituée et gouvernée sans plus tenir compte de la Religion que si elle n’existait pas, ou du moins sans faire aucune différence entre la vraie et les fausses religions. L’Archevêque Ireland, lui, serait absolument d’accord avec cette proposition condamnée.

 

Ce qui rend le problème terrible, c’est que l’Archevêque Ireland n’était pas simplement un “insensé” mais qu’il représentait tout un système de pensée très populaire dans une grande partie du clergé catholique américain. Ce mariage du catholicisme avec le culte de la liberté devait l’emporter, au point d’être sanctionné en tant que “doctrine catholique” à Vatican II dans le document Dignitatis Humanæ. Rien de surprenant à ce que le document ait été préparé par des prêtres américains, et qu’il ait obtenu l’appui des évêques américains dans leur ensemble, le Cardinal Spellman en tête. Le honteux compromis de doctrine catholique de l’Archevêque Ireland avait remporté la victoire dans la basilique du Vatican.

 

C’est précisément cette doctrine de liberté religieuse qui discrédita Vatican II. Cette assemblée de malheur avait produit d’autres doctrines hérétiques, c’est certain, et même plus profondes et de plus grande portée que celle-ci. Mais la Liberté religieuse porte cependant une marque distinctive, celle d’avoir été spécialement condamnée par le Pape Pie IX. Résultat ? La conscience catholique demeure perplexe : dois-je écouter l’autorité apostolique du Pape Pie IX qui me dit que la liberté de religion est une folie, une erreur monstrueuse, une erreur des plus fatales à l’Église catholique et au salut des âmes ? Ou bien dois-je écouter l’“autorité apostolique” de Vatican II qui me dit que la liberté religieuse est un droit que possède chaque individu en vertu de sa dignité humaine, un droit “qui a son fondement réel dans la dignité de la personne humaine telle que la parole de Dieu révélée et la raison la font connaître” ? (Dignitatis Humanæ n° 2, qui dit plus loin, “cette doctrine de la liberté a ses racines dans la révélation divine, c’est pourquoi elle doit être gardée d’autant plus fidèlement par les chrétiens”). C’est sur ce dilemme, sur cette contradiction qu’est basé tout le problème de Vatican II.

 

Liberté religieuse contre tolérance religieuse

Il faut ici distinguer entre liberté religieuse et tolérance religieuse. La liberté religieuse est cette doctrine qui affirme que tout homme a le droit de professer et de pratiquer la religion que bon lui semble, en accord avec la voix de sa conscience. La tolérance religieuse est cette doctrine qui affirme qu’une société civile peut moralement tolérer en son sein, si une raison suffisante le justifie, le mal que représente le fait qu’un certain nombre de ses citoyens professent et pratiquent de fausses religions (autrement dit des religions non-catholiques). Une raison suffisante de tolérer un mal si grand serait la nécessité d’éviter un plus grand mal, la guerre civile par exemple. Le terme même de tolérance implique un mal, et par conséquent nous ne parlons pas d’un droit à professer de fausses religions, puisque tout droit est fondé en Dieu. Il est inconcevable que Dieu concède à quelque chose le droit d’être faux : le droit, par exemple, de dire que Sa Mère Immaculée est une courtisane, ou que le Christ est adultère.

 

L’Église a toujours reconnu la prudence de la tolérance en certaines circonstances, et la situation des États-Unis est assurément l’une de ces circonstances. Le Pape Léon XIII enseigne :

 

Bien que l’Église prononce le jugement que différents cultes ne peuvent pas demeurer sur le même plan d’égalité avec la vraie religion, elle ne condamne pas cependant ces chefs d’État qui, en vue de procurer un plus grand bien ou d’éviter un mal, tolèrent en pratique la coexistence de différents cultes.

 

Le territoire des États-Unis couvrant une vaste étendue et incluant des myriades de religions, il est permis à son gouvernement de tolérer, par prudence, de nombreuses religions.

 

Mais la tolérance religieuse ne dispense pas un gouvernement de l’obligation de professer la seule vraie Foi, de reconnaître le Christ comme le seul vrai Dieu et l’Église Catholique Romaine comme Sa seule véritable Église.

 

C’est là que réside l’erreur-clé des tenants du culte de la liberté. Ce n’est pas qu’ils prônent la prudence de la tolérance religieuse pour éviter une guerre civile, ils prônent plutôt l’indifférence même du gouvernement à toute religion, comme si l’indifférence était l’une des grandes vertus de la Constitution. Ils exaltent le droit de tout homme à ouvrir la bouche pour dire tout ce qui lui plaît, à écrire tout ce qui lui plaît (ou en faire un film), à croire et à pratiquer la religion qui lui plaît quelle qu’elle soit. Tel est, selon les champions du culte de la liberté, le droit qui doit régir la société. Sous les régimes monarchiques, lorsque l’Église catholique était reconnue comme l’unique vraie religion, les êtres humains étaient “opprimés”.

 

La liberté : une fin en soi

Comme je l’ai déjà dit, l’Église catholique n’a jamais été ennemie de la liberté, bien au contraire, elle fut un défenseur acharné de la doctrine du libre arbitre contre un grand nombre de ceux qui la dénie. Elle n’a jamais favorisé non plus ni les tyrans ni les régimes oppressifs. Saint Louis, Roi de France, à l’apogée du Moyen-Âge “oppressif”, fut même admonesté par un pape parce qu’il châtiait trop sévèrement les blasphémateurs.

 

Là où l’Église et les partisans du culte de la liberté sont en désaccord, c’est lorsque l’Église enseigne que la liberté humaine est un moyen pour aboutir à une fin tandis que les champions du culte de la liberté voient la liberté humaine comme un fin en soi.

 

L’Église enseigne que la liberté ou le libre arbitre est une faculté dont l’objet est de choisir les bons moyens pour arriver à une fin prédéterminée. Pour nous la fin est déjà fixée : c’est le bien universel qui n’est autre que Dieu. Le moyen qui tend à cette fin est l’observance de la loi de Dieu : la loi éternelle, la loi naturelle, les Dix Commandements, les lois du Christ, la loi morale, les lois de l’Église. C’est la fonction de notre libre arbitre, telle qu’elle est voulue par Dieu, de choisir librement d’obéir à ces lois de telle sorte que nous atteignions la fin qui nous est assignée. Lorsque je dis “choisir librement”, je ne veux pas dire qu’il est pour nous facultatif de choisir de leur obéir ou pas. Je veux dire que nous sommes censés les choisir par libre élection, et non par simple mécanisme ou instinct, comme le font d’autres créatures en suivant la loi établie par Dieu. Dieu l’a ainsi établi, car l’amour que Lui porte une créature Lui procure plus de gloire qu’une simple obéissance mécanique ou instinctive à sa loi, comme celle des rochers ou des animaux.

 

Que nous soyons capables de nous tromper en ne choisissant pas les bons moyens pour arriver à notre fin, est donc un défaut de la liberté. La liberté ne peut pas être alors définie comme l’aptitude à choisir entre le bien et le mal, car, si telle était sa définition, nous devrions dire que Dieu n’est pas libre, puisqu’Il ne peut choisir le mal.

 

Les partisans du culte de la liberté ont une toute autre idée de la liberté. A Dieu, ils ont substitué la liberté humaine. La fin de l’homme, pour eux, consiste à être libre. Peu importe ce qu’il fait du moment qu’il le fait librement et sans contrainte. La “liberté de choix” est la plus grande qualité de l’être humain, issue de sa dignité même en tant que personne humaine, et doit être préservée coûte que coûte. Aussi la liberté n’est-elle plus une faculté de choisir des moyens pour arriver à une fin, mais une fin en soi.

 

Substituons le mot “manger” à celui de “liberté” et nous verrons à quel point cette notion est absurde. L’aptitude à manger et à digérer est une faculté qu’ont les êtres humains de se nourrir. Le fait de manger est moralement bon s’il est ordonné à une bonne fin et moralement mauvais si ordonné à une fin mauvaise. Si nous mangeons une nourriture saine avec modération, l’exercice de notre faculté de manger participe de l’excellence de la fin qui est la santé du corps. Si, au contraire, nous mangeons quelque chose de mauvais pour nous, ou si nous abusons de quelque chose de bon, le fait de manger devient moralement mauvais, puisqu’il participe à cette fin mauvaise. Imaginez alors que quelqu’un vous dise : “Peu importe ce que vous mangez ou quelle quantité vous mangez, ce qui est bon c’est le fait que vous mangiez”.

 

Par son absurdité, cet exemple montre l’absurdité du libéralisme selon lequel le libre arbitre de l’homme est le bien le plus excellent ; ce que l’homme choisit de faire est secondaire ; ce qui est d’une souveraine importance c’est qu’il choisit librement ce qu’il est en train de faire.

 

Le Culte de la liberté - cause de l’effondrement moral

Les seules contraintes que les champions du culte de la liberté imposent à leur déesse liberté résident dans le fait d’empêcher les gens d’assassiner ou de voler, du moins pour le moment. Je dis bien “du moins pour le moment” car nous avons déjà légalisé le meurtre en légalisant l’avortement.

 

En effet, au nom de la liberté de choix, nous avons assisté à la dissolution, l’une après l’autre, de contraintes imposées par des lois en vigueur il y a cinquante ans aux États-Unis ou dans d’autres pays. En 1920 par exemple, un pharmacien pouvait être arrêté pour vente de moyens ou de médicaments contraceptifs. A l’heure actuelle il risque l’emprisonnement s’il n’en vend pas, et ces produits démoniaques ont leur place dans les annonces publicitaires télévisées entre les cornflakes et les détergents, ils sont exposés en premier plan dans les drugstores à côté de l’aspirine et du shampoing, de telle sorte que les adolescents peuvent entrer et se servir d’un geste vif, sur le champ et sans aucune gêne.

 

Au nom de la liberté, il est plus facile à de futures mères d’entrer dans les cliniques-abortoires pour tuer leur enfant que d’aller chez le coiffeur. A ma connaissance, on serait arrivé, aux dernières nouvelles, à quelque chose comme vingt-cinq millions d’avortements. Dans ce pays quatre mille bébés sont assassinés chaque jour. Je le répète, il y a cinquante ans, ces mères auraient été arrêtées et poursuivies en justice, et les avorteurs avec elles.

 

Il n’est pas jusqu’au divorce pour lequel, en ce pays pourtant protestant, il n’ait fallu donner les preuves d’une “raison suffisante”. Il y a cinquante ans le divorce, bien que légal, était considéré comme quelque chose de scandaleux, même parmi les protestants. Pour les catholiques il n’existait même pas. Aujourd’hui ce n’est plus une faute.

 

Il y a cinquante ans, vous pouviez être arrêté pour comportement homosexuel ou parce que vous portiez les vêtements du sexe opposé. Tout récemment à San Francisco est passé un décret interdisant la discrimination contre les travestis. Autrement dit, si le vice-président de votre compagnie décide de porter une robe, des hauts talons, de se mettre du rouge à lèvres et du parfum, vous n’y pouvez rien faire. Je me demande si le franc-maçon Patrick Henri avait tout cela en tête lorsqu’il déclarait : “Donnez-moi la liberté ou donnez-moi la mort !”

 

La raison pour laquelle ces contraintes étaient en place, il y a une cinquantaine d’années, est que la population, naturellement conservatrice, insistait d’une façon illogique sur ces contraintes. Je dis “illogique”, car, une fois que vous avez posé le principe du culte de la liberté, il n’y a plus rien pour arrêter la liberté de choix pour quoique ce soit. Si on allègue la loi naturelle contre les avorteurs, les homosexuels, les divorcés, ceux qui pratiquent le contrôle des naissances, on vous répond tout simplement : “Nous ne croyons pas à la loi naturelle”.

 

A cela, les tenants du culte de la liberté ne peuvent rien répondre puisqu’en vertu du principe de liberté de conscience et de liberté d’expression, les gens ont le droit civil de rejeter la loi naturelle. Civilement, ils ont le droit de professer l’athéisme, de dire que Notre-Dame était une courtisane, que Notre-Seigneur était un fornicateur, que les enfants peuvent être tués dans le ventre de leur mère, que l’homosexualité vaut autant que l’hétérosexualité, que peu importe la façon dont vous vous habillez, en homme ou en femme – comme cela vous dit ce jour-là. Quelle loi les partisans du culte de la liberté peuvent-ils alléguer contre ces gens dès lors que depuis deux cents ans l’évangile de la liberté de conscience, de la liberté de religion, d’expression et de la presse, n’a cessé d’être prêché partout, présentant ces libertés comme ce qu’il y a de plus élevé et de plus ennoblissant en matière de qualité de vie humaine ?

 

Ici on pourrait peut-être objecter que ni la culture ni la Constitution américaines n’entendent arriver à un tel abus de la liberté humaine, mais qu’elles s’efforcent seulement de faire respecter les libertés vraies et bonnes. C’est cet argument qu’oppose le conservateur au libéral qui lui jette à la tête ce culte de la liberté.

 

Mais voyons où se trouve le fondement d’une telle objection. Où est-il statué dans la Constitution ou dans tout autre document important des États-Unis d’Amérique que les libertés garanties à ses citoyens doivent être limitées par une loi éternelle de Dieu, ou par la loi naturelle ? Où, dans ces documents, trouve-t-on une simple mention de Notre-Seigneur Jésus-Christ ?

 

Où est-il dit dans la Constitution américaine que la loi naturelle existe, et que le Congrès, le Président et la Cour Suprême sont tenus d’observer la loi naturelle dans leurs actes respectifs de législation, de mise en vigueur des lois, dans leur interprétation ? Nulle part. Ces trois entités sont trois agents libres, qui ne sont liés par aucune loi, mais qui sont en eux-même la loi.

 

Non, la tentative du conservateur de limiter la liberté tellement chérie par la culture américaine est fallacieuse. Liberté de religion signifie que vous avez le droit de rendre un culte au dieu de votre choix, même à Satan. Liberté d’expression signifie que vous avez le droit de dire tout ce que vous voulez, même des blasphèmes. Liberté de la presse signifie que vous avez le droit d’imprimer ce que vous voulez, même de la pornographie, des blasphèmes et des hérésies. Aucun Congrès, ni aucun corps législatif d’État ne peuvent logiquement mettre un frein à ces choses, puisque une telle retenue serait une dénégation arbitraire du droit à la liberté d’un individu.

 

Les effets de ce culte de la liberté sont désastreux. Car aussi longtemps que le peuple américain demeurait naturellement conservateur, probe et religieux, il était suffisamment d’accord sur les questions morales et religieuses pour contenir au moins la marée des maux les plus graves. C’est de ces temps, avant 1960, ou mieux avant Roosevelt, que la plupart des conservateurs américains rêvent pour former leurs opinions politiques. Mais ces temps sont révolus. Nous vivons maintenant le règne de Satan, règne dans lequel les gens se sont livrés à une débauche indescriptible avec une absence éhontée d’égard aux lois de Dieu et simplement même à la loi naturelle, un égoïsme et une dureté qui vont jusqu’à justifier le meurtre des enfants non désirés. Dans la voie où s’achemine cette population sans Dieu il n’y a plus la possibilité de remettre en place les restrictions qui étaient en vigueur il y a cinquante ans. Une seule chose reste à espérer pour les conservateurs : le réveil moral des États-Unis.

 

A l’appui de ce fait il y a que récemment dans ce pays, ladite renaissance “conservatrice” a concentré presque tous ses efforts sur des problèmes économiques. On veut supprimer la “sécurité sociale”. Bravo, mais pourquoi pas supprimer l’avortement ? Les droits des homosexuels ? Le contrôle des naissances et les moyens contraceptifs ? L’éducation sexuelle ? Les films pornographiques et la TV ? La libération de la femme ? L’humanisme laïque dans les écoles ? C’est là que résident les véritables plaies de la société américaine, et non dans les impôts élevés ou la sécurité sociale, et ces maladies sont l’effet de l’effondrement général des mœurs. Et le problème est qu’il n’y a pas moyen d’éradiquer légalement et logiquement ces infections si ce n’est par un principe, un principe qui limite la liberté humaine aux objets qui sont bons. Car aussi longtemps que le culte de la liberté est en place, ces influences pernicieuses et bien d’autres encore qui pèsent sur notre vie quotidienne doivent se perpétuer sous le couvert protecteur de la liberté humaine.

 

Le principe qui nous fait durement défaut est la loi de Dieu. Mais étant donné que le Congrès se doit de ne jamais établir de religion, il ne peut même pas appliquer les Dix Commandements à nos vies, il ne peut même pas mentionner Notre Roi et Seigneur Jésus-Christ, et moins encore l’Église catholique romaine. Non, notre pays est condamné à rendre un culte à la déesse maçonnique Liberté, et, par là-même, à être précipité dans la corruption morale et la destruction finale. L’Amérique - et tout pays qui rend un culte à la déesse Liberté - ne peut éviter cette destruction que si elle abandonne le Culte de la Liberté.

 

Une politique vraiment catholique

Je n’entends pas détourner les gens de travailler activement à supprimer l’avortement ainsi qu’à éliminer de leur vie les autres influences libérales. Cependant, je pense que le catholique devrait comprendre les principes politiques et moraux qui sont en jeu dans la culture américaine. Il n’y a pas à espérer une paix permanente de ‘loi et ordre’ tant que le culte de la liberté dominera la mentalité du peuple américain, ou du peuple de toute autre nation d’ailleurs. Je ne pense pas que les conservateurs catholiques américains doivent soutenir, en tant qu’idéal, le système même du culte de la liberté qui nous a occasionné ce problème épouvantable, qui nous a valu l’avortement, les droits des homosexuels, l’éducation sexuelle, la pornographie et tout le reste.

 

Sur le plan politique la seule position vraiment catholique consisterait à désirer pour son propre pays une Constitution qui reconnaisse Notre-Seigneur Jésus-Christ comme Roi et l’Église Catholique Romaine comme seule et unique vraie Église du Christ, une Constitution qui soumette la nation aux lois du Christ, c’est-à-dire aux lois promulguées par Son Église. Si éloigné et impossible que semble être cet état de choses, tel doit être cependant, par définition, l’idéal catholique - je dis bien par définition - car on ne peut se dire catholique si l’on ne désire pas cet état de choses pour son pays.

 

Tout ce qui est au-dessous n’est pas un idéal, mais une simple demi-mesure, un mieux que rien qui n’est cependant pas encore suffisant. Surtout, les hommes politiques catholiques devraient s’opposer avec acharnement à tout système de gouvernement qui a le culte de la liberté humaine et met sur un piédestal l’indifférence de l’état vis-à-vis de la religion. Car logiquement un tel système conduit précisément à ce que nous avons aujourd’hui : l’anarchie des mœurs.

 

Cependant, loin de perdre espoir et énergie, les catholiques devraient lutter autant qu’ils le peuvent pour maintenir la ligne de rectitude morale dans les lois locales et nationales. S’il est vrai en effet que logiquement le culte de la liberté conduit à l’anarchie des mœurs, il est cependant vrai aussi que les peuples ne sont pas toujours conséquents et logiques. Une forte pression de la part des catholiques et d’autres gens qui croient au moins à la loi naturelle, pourrait amener effectivement des changements considérables en faveur du bien. Ma seule préoccupation est que la mentalité du catholique ne soit pas empoisonnée par les idéaux protestants et maçonniques concernant la liberté humaine et l’état laïciste, non religieux.

 

Et puisque nous sommes sur ce sujet, j’aimerais profiter de l’occasion pour dire un mot de mise en garde contre l’animateur d’une causerie émise par une radio nationale “conservatrice”. Si les commentaires de cet individu sur les libéraux sont franchement amusants, une chose me gêne en lui : il a l’esprit mal tourné, et fait des plaisanteries obscènes sur un mode tout ce qu’il y a de plus répugnant. Il est deux fois divorcé, trois fois “marié”, ce qui ne correspond pas à l’idée que je me fais d’un “conservateur”. Je remarque aussi qu’avec lui les questions morales sont en majeure partie laissées en veilleuse au profit des problèmes économiques les vrais sujets en vedette. Cet homme est malheureusement représentatif d’un grand nombre de conservateurs : des gens qui, tout comme les libéraux, ont fait banqueroute sur le plan moral, des gens à la poursuite d’argent et de succès, qui désirent simplement maintenir le gouvernement hors de leurs affaires. Chose alarmante, sur un certain nombre de points c’est également un “globaliste”. Je crains qu’il n’éduque les conservateurs pour en faire des gens à son image : des adeptes acharnés du culte de la liberté, moralement pervertis, des égoïstes cherchant à écarter le gouvernement de leur chemin vers le bonheur, un bonheur qui consiste dans l’argent, le prestige et le succès.

 

Dénigrement de l’Amérique ?

Je dois maintenant répondre à l’objection que j’ai suscitée en dénigrant l’Amérique. Le terme même implique qu’il n’y a rien qui cloche vraiment dans le système américain. Il implique qu’en elle-même l’Amérique est grande et belle, et que ses problèmes viennent seulement du fait que le peuple américain, politiciens et particuliers, a abandonné l’idéal américain d’origine.

 

Mais j’affirme qu’il y a dans le système américain quelque chose de très imparfait, en ce sens que c’est un pays qui ne professe aucune religion. Un pays qui se flatte d’être sans religion. Fier de ce que ses lois ne sont pas réglées par un principe supérieur. Fier de ne pas reconnaître Notre-Seigneur Jésus-Christ comme Roi. Ce qui, à mes yeux est une abomination, un caractère que le peuple américain a en commun avec la foule hurlante des Juifs perfides dans le Prétoire de Pilate.

 

Même Pilate, tout païen et peureux qu’il était, eut le cran de faire placer sur la croix l’inscription, Jésus de Nazareth, Roi des Juifs. Et lorsque le grand prêtre protesta, réclamant que fût mis plutôt, “Il disait ‘Je suis le Roi des Juifs’”, manifestement pour protéger la liberté religieuse du Judaïsme, Pilate eut le courage de leur dire, “Ce que j’ai écrit, je l’ai écrit” - une manière très éloquente et très romaine de leur dire de se taire.

 

De même, à mon sens, les Américains devraient placer cette inscription au-dessus du mot Amérique : Jésus de Nazareth, Roi des États-Unis d’Amérique. Et s’ils sont accusés de dénigrer l’Amérique (ce serait en effet une gifle pour la Déesse-Liberté), je pense qu’ils devraient avoir le cran de répondre : “Ce que nous avons écrit, nous l’avons écrit”. Car il n’est en aucune façon contraire à la justice due à son propre pays, de signaler ses erreurs, en particulier ces erreurs systématiques qui risquent d’entraîner sa destruction. Par ailleurs ce serait pécher que d’aimer, tant dans un pays que dans un individu, ce qui en lui est péché, ce qui en lui n’est pas de Dieu. Personne ne me convaincra jamais que l’indifférence du gouvernement américain et de la culture américaine vis-à-vis de Dieu est une chose qui Lui agrée.

 

Léon XIII l’a dit :

 

"Sans religion, une société bien réglée est impossible."

 

Tous nous avons le devoir d’être attachés à notre patrie, source d’un si grand nombre de biens dans la vie de chacun. La patrie est une extension de notre propre famille ; c’est pourquoi elle devrait être toujours considérée avec respect, amour, loyauté et admiration. Mais de même qu’il est de notre devoir de charité de faire remarquer leurs fautes graves aux membres de notre propre famille, il est de notre devoir de charité de signaler les fautes importantes de notre propre pays. Pour l’Amérique – et toutes les autres nations occidentales - il en est une d’importance : c’est qu’elle se glorifie de son indifférence envers le Christ-Roi. Les catholiques ne peuvent pas reléguer ce défaut flagrant au rang d’un simple écart de politique, il doivent désirer pour leur pays ce que leur Foi Catholique désire : la répudiation du culte maçonnique de la liberté, et la reconnaissance publique du Christ-Roi et de Sa Sainte Église Catholique.

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